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Le Scriptorium - Page 132

  • PISTOIA : le temps du jumelage poétique I

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     a Pagine italiane I e II

     

    S_Giorgio_Blog.jpgFin du mois d'avril dernier. Une escouade de poètes du Scriptorium s'achemine vers la ville de Pistoia où leurs homologues toscans et la municipalité, en l'enceinte de la belle bibliothèque San Giorgio, leur réservent un accueil chaleureux. Trois jours durant, au rythme soutenu des différents temps de rencontre, les quatre poètes français, Dominique Sorrente, André Ughetto, Angèle Paoli et Olivier Bastide ainsi que leurs accompagnateurs Elena Berti, Yves Thomas et Valérie Brantôme, vont amorcer un parcours commun en poésie sous le signe de l'Europe en compagnie des poètes italiens Paolo Fabrizio Iacuzzi, Maura del Serra, Martha Canfield et Alessandro Ceni.

    Au programme, conférence, ateliers de traduction, lectures en extérieur et à l'auditorium Tiziano Terzani de la bibliothèque, découvertes du patrimoine culturel.

     

    Époque 1 :         Tour de table dans la langue des poètes

     

    Mercredi 22, jeudi 23 et vendredi 24 avril - Les Matinales à la « Saletta Bigongiari »  :  dédiée à l'illustre poète italien du même nom, cette salle de la bibliothèque héberge les 5000 ouvrages documentaires du Fonds Bigongiari rassemblés sous l'autorité de P.F. Iacuzzi ; elle sera le théâtre des ateliers de traduction poétique. Fruit de collaborations à la fois bilatérales et collectives, les poèmes objets des traductions * donnent lieu à des débats animés et pointent tout l'enjeu de la justesse de cette pratique de translation d'un idiome vers l'autre : coller au plus près du texte  dans un souci de fidélité, adapter parfois jusqu'à réécrire dans sa langue, se fondre dans la peau du poète étranger pour retranscrire au mieux son style, tels sont les éléments qui ont nourri les échanges des participants assis autour de la table. 

    Quand la donne du jeu et la quête du sens se croisent puis se fécondent, l'aventure peut commencer. **

    Le coeur devenu différent, l'esprit relié **, l'aventure continue...

    Au retour, impressions et poèmes ont fleuri de part et d'autre dans le sillage des rencontres.

     

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    Face à face nos langues

    au commerce de mots,

    regarde au magasin

    LesMatinales_MC_AP.jpgles réserves de sens,

    pèse à leur trébuchet

    le métal de syllabes,

    choisis l’or des vocables

    à leur fine musique.

    Face à face nos corps

    nos amours nos énigmes,

    désir d’identité :

    autrui est-il le même 

    ou suis-je singulier

    derrière mes remparts ?

    Les murailles du moi

    rendraient vaines les flèches

    dirigée vers les cœurs

    que l’on voudrait gagner ?

    Mais l’acte de traduire

    et son vœu de séduire

    rendent heureux le négoce :

    du poème invité

    à franchir les frontières

    un luxe de paroles

    différemment rythmées

    ajoute d’autres moires

    à son éclat premier !

     

     

    André Ughetto

     

     

     

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    ATELIER 1

     

    Ils ôtent un mot, puis l’autre, en déploient dix, monnaie d’échange,

    forment rayures de tout cela. Ils se partagent à pleines dents

    la phrase livrée  du poème du jour, la placent sur le dos de la table

    pour instruire leurs bricolages minutieux.

     

    L’un s’aventure, l’autre retranche. La formule se cherche, pierre secrète

    à frotter jusqu’au feu.

     

    Ou bien non. Ils ne font  que glisser dans le calque incertain,

    porter l’empreinte à l’athanor.

     

    Dans le peu à peu des propositions, passé les écueils et les manques,

    le poème se dessinera au milieu d’eux

    une manière double.

     

    Une ressemblance équivoque qui, tour à tour, les inquiète, les réjouit.

     

     

     

    ATELIER 2

     

    En marge du désordre promis aux officiants, j’habite désormais

    une vitrine sous laquelle je laisse  les minutes m’envahir.

    Lettre décachetée, je m’expose au temps qui posera ici ses yeux

    en trait d’union.

     

    Le déchiffrement d’un jour

    qui a choisi de se poser  sur cette aile fragile

    me tient lieu de

    plein exercice.

     

    Qui croira que je saurai rester là dans cette enclave de bibliothèque

    sans troubler les passants,

    leur enseigner comment

    attendre l’aube d’un jour de vie depuis longtemps déjà

    révolu ?

     

     

     

    ATELIER 3

     

    Quelque chose s’entreprend qu’on ne sait dire.

    Entre l’intime concision de quelques mots, tressés sur page,

    et l’univers en extension des voix

    qui se prolongent à l’infini.

     

    Plus l’on fixe et plus l’on déploie. Leçon de la matinée.

     

    Le poète présent regarde avec la curiosité d’un encore vivant

    s’en aller son travail  dans un autre berceau de langage.

     

    Rappelle-moi qui je fus

    quand le monde des regards multipliés

    n’existait pas, dit-il, quand  le monde de l’autre

    se terrait encore dans son premier tremblement ?

     

     

                                                        Dominique Sorrente

     __________________________________________________________________________

    NB : * Les poèmes traduits lors des ateliers seront publiés dans son prochain numéro d'automne par la prestigieuse revue italienne de poésie comparée Semicerchio, partenaire des rencontres du jumelage poétique à Pistoia.

    ** Citations extraites de Parole première, texte fondateur du Scriptorium.

    Pages liées :

    • rubrique Agenda
    • poèmes des ateliers de traduction publiés en partie (Angèle Paoli) sur le site Terres de femmes (ici & ici).
  • Le mura dei poeti I

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    PONTE  MEDITERRANEO  DI  VOCI

     

     

            Portati nel nostro quieto nido toscano da un viaggio nella primavera, siete stati, per noi quattro (Maura, Paolo, Martha, Alessandro), i quattro elementi rinnovati nell'aprile, incarnati con sperata sorpresa nella transalpina lingua sorella: Olivier, la terra e il suo tormentato, virtuosistico Agrimensore; Angèle, l'acqua primordiale balenante di lame ignote sulla soglia del bosco; Dominique, l'aria tesa e attorta in Apocalissi di passione ironica; André, il fuoco sapientemente specchiato nell'arcano del barocco di Roma o nella finesse fiorentina. Quattro più quattro, doppio numero terrestre, a specchio multiplo l'uno dell'altro e gli uni degli altri, in coppie moltiplicate e intersecate per formare a ciascuna delle due lingue, parallele e incongiungibili al modo delle rette, un possibile doppio speculare fatto di paziente intuizione, molato  nell'intueri, nel guardare dentro il corpo delle nostre parole attraverso le parole e la lingua dell'altro, degli altri compresenti. 

     

           Chiusi per il numero evangelico di tre giorni nella piccola cella assolata del grande alveare librario che nutre di memoria e di coscienza europea la nostra città del silenzio, abbiamo lavorato insieme per riconoscerci nelle radici e nelle pietre di fondamento di un'opera comune da far presto svettare, feconda di strade e di torri alberate; per lanciare, con gioiosa pazienza, un nuovo ponte di voci sul sempre vivo Mediterraneo, che è mer e mère, mare e madre unico-unica della multanime nonna Europa e del suo millenario Scriptorium.

     

           E i brindisi conviviali, le svelte passeggiate, le visite d'arte, i libri di poesia scambiati in dono con pudore orgoglioso e quasi impaziente, le confidenze aperte e richiuse in guizzi alla scoperta di affinità elettive; lo sforzo per con-sentire in un'anima reciproca, per verificare dal vivo che tradurre ed essere tradotti è tradere, attraversare il ponte del senso volgendolo dalla sistole della parola alla diastole della vita e viceversa; e il dionisiaco temporale che si scatenò, con l'ironia implacabile di una nemesi, sulla città e sui camminamenti della Fortezza Santa Barbara che accoglievano le nostre letture itineranti di versi amati, i lampi e i tuoni impersonali in gara vittoriosa con le nostre voci d'improvviso fragili e semicancellate... 

     

           E infine il vostro nostos alla volta di Marsiglia, amici, col sole ritrovato, e le poesie e le foto lanciate nell'oceano virtuale come monete augurali nella fontana dello spaziotempo: tutto adesso mi sta nella mente del cuore - e attendo, attendiamo con voi che una nuova famiglia di parole illumini con fedeltà quel ponte.

     

     

    Maura del Serra

     

     

     

     

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  • Dalle mura...aux remparts de Pistoia

     

    Poèmes extraits de Le mura di Pistoia, de Piero Bigongiari

    Compagnons de traduction : Philippe Jaccottet - André Ughetto             

     

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    Miskolc

      

    Il sangue non marcirà la fede,

    crede chi crede che il mondo è più grande

    di chi lo vuole fare somigliare

    nemmeno più al dolore, di chi vuole

    che le ore del tempo vivano senza luce,

    quasi di un sole, nel carcere

    e nello sguardo della morte, nero,

    per chi va nei suoi spazi che un confine

    non può dire finiti.

     

    Ma nemmeno infiniti... Chi piange

    attorno alla vostra morte, chi ha forza

    ancore di disperare ? I fiumi eterni

    che percorrono l’Europa sotto le nebbie e il sole

    rampano verso un mare che è uguale

    alla salita della vostra morte :

    dura salita, ma in cima

    l’infinito non ha confini nemmeno umani.

    Già uno muore se esce dalla porta

    della stanza dove ha udito la condanna.

     

    Brumosi opifici rompono il sole del Nord,

    il mare rosicchia le coste tirrene,

    io di quassù l’odo nel canto allarmato del passero,

    le asine zoccalano lente nei borghi turriti

    tra le bufere e gli azzurri da cannocchiale astronomico,

    sotto, i boschi s’infogliano, s’infiammano, s’inceneriscono,

    ma tutto è troppo lento per la vérità indivisa

    che gli uomini spezzano in aprole, partiscono in ostie.

     

    Miskolc

     

     

    Le sang ne fera pas pourrir la foi,

    chacun peut croire à son gré que le monde est plus grand

    que ceux qui ne veulent pas même

    le laisser ressembler à la douleur, que ceux qui veulent

    que les heures du temps vivent sans lumière,

    comme d’un soleil, dans la prison

    et dans le regard  de la mort, noir,

    pour qui va dans ses espaces qu’une frontière

    ne permet pas de dire finis.

     

    Non pas cependant infinis… Qui pleure

    autour de votre mort, qui encore a la force

    de désespérer ? Les fleuves éternels

    qui traversent l’Europe sous les brouillards et le soleil

    rampent vers une mer qui est semblable

    à la montée de votre mort :

    dure montée, mais au sommet

    l’infini n’a plus de frontières, même pas humaines.

    On meurt à peine a-t-on passé la porte

    De la salle où on a entendu le verdict.

     

    De brumeuses usines offusquent le soleil du Nord,

    la mer ronge les côtes tyrrhéniennes,

    moi d’ici je l’entends par le moineau dont le chant s’alarme,

    les ânesses font claquer lentement leurs sabots

    dans les bourgades ceinturées de tours

    entre les ciels d’orage et d’azur calme pour lunette astronomique,

    en bas les bois s’enfeuillent, s’enflamment, tombent en cendres,

    mais tout est trop lent pour la vérité indivise

    que les hommes brisent en mots, fractionnent en hosties.

     

     

    Traduction André Ughetto 

     

     

     

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    In una sera di vento e di luna lundo il Mugnone

     

     

    Agita la tua tenebra stasera,

    grande, più grande nel tuo vuoto, luna,

    questo vento argentino che non coglie,

    oltre le foglie lapidate a bruno

    nei giardini stormenti, altro dolore :

    lustra i crateri dei vulcani spenti;

    qui il silenzio impietrito delle soglie.           caballo y noche 003.jpg

     

    Come al bimbo donò un’addolorata

    Allegria la muraglia della Cina,

    queste sono le cose, qui è l’evento

    che il dolore allegrato ora ravvisa,

    messo in forse dal vento come vela

    che ne porto hanno alato per salpare.

     

     

    Par un soir de vent et de lune au bord du Mugnone

     

     

    Agitant ce soir ton obscurité,

    lune immense et grandie encore dans ton vide,

    le vent argenté ne recueille

    d’autre souffrance que celle des feuilles

    striées de noir dans les jardins bruissants :

    il lustre les cratères des volcans éteints,

    le silence ici pétrifié des seuils.

     

    De même qu’à l’enfant la muraille de Chine

    fit ce cadeau d’une allégresse douloureuse,

    telles sont les choses, voici l’occasion

    que l’allègre douleur maintenant reconnaît,

    querellée par le vent comme une voile

    qu’on a hissée au port pour appareiller.

     

     

    Traduction André Ughetto 

     

     

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