FACE A LA PAROI POÉTIQUE
Ma relation à la poésie, je la crois animée par trois énergies qui se complètent et s’irriguent entre elles : un appel de l’Enfance, le vertige d’un dialogue avec l’Inconnu, une langue et un corps où le verbe Aimer cherche sa conjugaison.
Il y a tout d’abord, ce désir de retour aux origines, à l’enfant en moi qui se souvient de la liberté d’appréhender le monde avec ouverture, curiosité, amusement, innocence.
Renouer avec cette connexion au sensible, à l’imperceptible, dialoguer avec la parole des animaux, le langage du vent, la magie des étoiles et des astres, la malice des pierres, et l’Autre, avec sa bouche et ses yeux en miroir. Il y a dans le caractère précieux de l’enfance une ouverture aux sens, et une capacité à se relier à tout ce qui existe, le visible comme l’invisible.
Ce lien créé par l’enfant le traverse. Il est vécu par lui comme réel, il fait sens au dedans et résonne intimement, intensément.
Ma recherche, mon désir d'être en lien qui me parvient de l’enfance, m’a ouvert a une relation singulière et intime dont s’ empare mon expérience de la poésie.
S’ouvre alors le dialogue avec l’Inconnu. Celui-ci semble d’abord insaisissable, le nommer offre son lot d’impossibilités. C’est une traversée aveugle, comme les racines d’un arbre qui creuse, ramène et cherche de quoi fournir du travail à la lumière.
Face à l’innommable, l'inconnaissable, l'énigmatique profondeur du réel. On y va à tâtons, avec lenteur et obstination. Les découvertes s’offrent alors comme des flashs, des intuitions, des directions que nous arpentons sans en connaître ni la destination ni les rencontres.
À chaque instant, ce dialogue avec l’inconnu suggère une expérience toujours renouvelée. A chaque mot, à chaque sensation, à chaque image, il y a la possibilité d’une rencontre éphémère, intense et fugace.
Un autre territoire apparaît alors celui du lien primitif qu’on peut appeler le désir d’aimer vivre. Et même dans le noir, aimer à s’y perdre. Aimer avec ce qui accueille tout en dépit des fracas et des pertes.
La poésie serait - elle le désir de vouloir faire l’amour avec la vie ? (Le poème est l’amour réalisé du désir demeuré désir, écrit René Char)
Être en poésie selon moi c’est être amoureuse de cette sensation désarmante que la vie ne nous appartient pas mais qu’elle nous propose une alchimie à découvrir.
C’est être le coeur d’un trou noir, qui cherche sans cesse une paroi de caresses au bord d’un néant …
Ma relation à la poésie est un peu tout cela, une énergie qui demande à circuler entre les traces de l’enfance, l’appel du tout autre, et le vertige de vivre au-delà des effrois.
***
Wambrechies, avenue de la gare.
Partir et aller vers
Il y a toujours un toujours.
Être à nouveau braise et charbon bleu
Vent qui titube
Vieux coeur qui se réveille l’enfant me frôle tel un fantôme dans mes yeux
qui parlent avec trop de cris et de silence.
Bonbons, bonbons
Silence des pissenlits au bord de la balançoire, du train qui me susurrent tous les départs possibles.
Du café au coin et ses jeux à gratter et ses
bonbons, ses bonbons
du garçon, copain qui accompagne
nos solitudes et nos bonbons.
Sans s’aimer se partager en aimant se partager.
L’enfant se balance, s’en balance avenue de la gare.
Il pleure sans le savoir
et le vélo dans les champs de maïs
cabossés de ses colères
et le vélo le soulage.
Il pleure sans le savoir avenue de la gare et cherche les jeux qui le reposent. Bonbons bonbons
L’ enfant me frôle tel un fantôme
Son silence m’offre des regards flous des gens bruyants flous
des points d’interrogations flous
et des étoiles des étoiles qui relient ses pieds d’ailes.
L’enfant et ses silences
ses cris en triturant le gravier
et ses bonbons
ses bonbons
L’enfant me frôle tel un fantôme.
Respirer
Je crevasse sous le poids
des mesures indécises qui creusent des creux.
L’air ne trouve plus sa nuance
L’air s’écroule
au fond de la grotte des amours ratés
L’air cherche le bord du précipice
pour retrouver son appétit d'infini
et son amour sans attache.
***
Coline Marescaux , chercheuse poétique
Poétesse du quotidien, comédienne et metteuse en scène.
Les séismes du cœur en salle d'accouchement
Les séismes du cœur
Pour faire place à la vie nouvelle
Fragile et incertaine.
Coline Marescaux est née en 1988 à Tourcoing dans le Nord de la France.
Après des études d’ Arts du spectacle à Arras et au Conservatoire d' Art dramatique d’ Arras et de Roubaix, Coline Marescaux suit une formation théâtrale et pluridisciplinaire en Biélorussie en 2010.
Elle continue par la suite à se former avec la Méthode Chekhov à Bruxelles, ainsi qu’en technique vocale et chant avec notamment Emmanuel Pesnot. Elle poursuit sa formation avec la Méthode d’ Alexandre del Perugia.
Tout en poursuivant sa formation, Coline Marescaux commence sa vie professionnelle en 2012 en tant que comédienne. Elle intègre la compagnie du Théâtre de l’ordinaire, ainsi que la compagnie Protéo. Elle y découvre le jeu masqué ainsi que le jeu bouffon.
Elle participe à de nombreuses créations comme par exemple : Carmen- Carmen, une mise en scène de Louise Wailly (2013, Théâtre Massenet, à Lille), On the way to the front, Good reputation endures for ever (Création franco- hongkongaise, tournée en Chine et en France sur 5 mois, en 2015), Les fusils de la mère Carrar de Brecht (Festival d’ Avignon en 2016) avec une mise en scène de Maxime Séchaud.
En octobre 2015, Coline Marescaux prend un tournant décisif et radical dans son parcours artistique avec la poésie au cœur de son expérience.
Elle co-crée avec Céline Hilbich et Olivier Nikolcic la Compagnie Stelistô De Tempo et signe en 2016 sa première co-mise en scène avec Céline Hilbich, Sans Frontières fixes de Jean-Pierre Siméon. Le spectacle est labellisé par le Printemps des poètes, et soutenu par l’auteur lui-même. Il est donné notamment à l’Institut Français d’ Alger et à la Basilique de Saint Denis (en 2016)
Suite à ce spectacle, Coline entame une recherche poétique active. Elle décide alors de s’ouvrir à de nouveaux horizons et de prendre le large en déménageant à Marseille.
En 2018, elle fait la rencontre de l'auteur et journaliste Mustapha Benfodil (Alger) et lui propose l’écriture de sa nouvelle création : Tout est là. Cette collaboration aboutit à de nombreuses recherches autour de la transmission de la poésie, ainsi que de nombreuses sorties de résidences publiques (notamment à la Maison de la Poésie d’Avignon en 2019).
Parallèlement en 2018 et 2019, elle trouve un terrain d'expérimentation pour ses premières recherches poétiques en créant avec l’association Stelistô de tempo, le Festival de poésie Ici ou là à Lille. C'est l'occasion pour Coline de créer plusieurs formes poétiques dans l'espace public : Réveil des sens (Immersion poétique pour un spectateur), Révoltons! (Happening poétique pour cinq comédien.n. e.s), Destination inconnue (Déambulation poétique et active pour six spectateurs).
Depuis, Coline Marescaux anime également, pour tous les âges, et en tous lieux, des ateliers d'écriture et d’oralité.
Coline Marescaux se définit comme une chercheuse poétique, elle explore et crée des formes poétiques singulières, sensibles et accessibles selon l’espace et les publics où elle s’intègre.
Sa recherche poétique actuelle est centrée sur la question d’un Corps poétique. Elle s'oriente vers les espaces dans lesquels les poèmes peuvent résonner sensiblement, réveiller des sensations et trouver ainsi une densité particulière. Ce qui est mis en jeu ici est la quête d'une relation pleine et entière entre le Corps-Poème et le spectateur...