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Les feuillets de poésie

  • DOMINIQUE SORRENTE, ANNE SLACIK- ICI NE TIENT JAMAIS EN PLACE- pour devancer les questions indiscrètes...

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    à l'occasion de la sortie du recueil de poésie "Ici ne tient jamais en place", édité par Voix d'encre, Dominique Sorrente évoque un aspect de la fabrique de ses poèmes accompagnés par les peintures d'Anne Slacik.

                            

                                                     *

    Ici, soyons simples, le texte est le point de départ.

    C'est cela qu'on voudrait dire, tout en sentant vite ce que cette formulation a de maladroite, de hasardeuse, de taillée à la serpe.

    Car oui, l'ordre des entrées en scène va des poèmes aux peintures. Le protocole (oh, la polysémie de ce mot...) indique que les personnages sont entrés, l'un après l'autre dans la ronde, d'abord le poète, ensuite la peintre. Comme on le fait dans une descente d'escalier qui mène à la découverte.

     

    Mais quoi ? Les poèmes forment une suite obtenue, plus qu'un énoncé au fil du temps. Souvent placés (peut-être parfois, j'ose l'espérer, gagnants...), dans le pas d'une marche précise qui eut lieu sur une flèche de sable sur le littoral vendéen. Après l'élan des premières nominations, ils ont connu l'agencement des balises, les exercices de déplacement, ajouts, défalques, petites manies à traquer des virgules, à questionner des blancs entre les strophes...en somme, l'ordinaire de la création poétique maison et ruines.

     

    Les peintures d'Anne Slacik ont à leur tour exploré des échappées, lâché des coulures, risqué des prolongements. Elles ont proposé de troublantes fluidités qui n'appartenaient à aucun plan préétabli, mais seulement résultaient d'une mise à l'écoute par les yeux et la main.

     

    Et tout cela fut en son temps posé comme un jeu de cartes de patiences, au pluriel. Un jeu où la règle avait à s'inventer pour former un livre, rythme, contre-rythme, et le glissement des pages, une à une.

     

    "La peinture est le lieu de nous où toute chose se dénoue" a écrit Aragon. Impossible de vérifier. On peut s'en émouvoir à l'infini, s'en amuser aussi. Car en fait de dénouement, on n'a pas fini de voir revenir les vagues, se changer les instants. On est bien face à un geste saisissant, merveilleux qui nous excède. Cela nous est hors de portée. Cela ne vient à travers nous que pour un moment bref, toute peintre, tout poète que nous sommes.

     

    Si "la Bohème est au bord de la mer"* comme l'a joliment écrit Ingeborg Bachmann, la flèche de sable visitée dans ce livre, localisée à la Pointe d'Arçay sur le littoral du marais poitevin, nous donne un autre enseignement: celui de deux "moitiés du monde" si l'on peut dire en apprentis géomètres, qui, inlassablement, se côtoient, se recouvrent, s'espacent...Une lisière où tout commence toujours.

     

    Exercices de rapprochement et de mise à distance. Ici ne se laisse pas tenir. Ici appelle plus qu'il n'affirme. Ici pose sa stèle mais aussitôt se défait dans la mue de ses peaux.

    On pourra s'y mettre à deux, peintre et poète, scruter à tâtons l'inconnue devant soi, elle restera la promise, la dérobée, cette variable qui surgit, joue et déjoue et nous enchante.

     

    Alors dans notre "métier d'ignorance" (Claude Royet-Journoud), nous prendrons le parti d'en sourire. Ici est porteur d'insolite. Il faudra donc avec nos outils de passage redécouvrir l'art du "hic" ...en attendant de se laisser troubler par le "nunc" de maintenant. Mais ceci est une autre histoire d'un autre livre...

     

    Oui, pour chacun, et c'est notre fortune du moment, Ici ne tient jamais en place.

     

                                                                          Dominique Sorrente

     

    00 Quatrième de couv livre  ICI DOMINIQUE SORRENTE.JPG

    quatrième de couv.

     

    Le livre Ici ne tient jamais en place de Dominique Sorrente est accompagné de 15 peintures d'Anne Slacik. Il est édité par Voix d'encre         ( 96 pages).

    Prix: 19 euros. Disponible sur le site de l'éditeur: https://www.voix-dencre.net/

     

    * cité dans Anne Slacik, La Bohème est au bord de la mer, peintures et livres peints, Manoir des livres, Lucinge, 2020

    Avec Anne SlacikJPG.JPG  

    Anne Slacik et Dominique Sorrente - Pompignan   été 2022        

    Avec Alain Blanc.JPG

    Dominique Sorrente et Alain Blanc aux éditions Voix d'encre (Espenel, été 2022)

  • Pour saluer les Afrique(s) en poésie, au Scriptorium de Marseille

     

    Ce 4 mars, jour du lancement du Printemps des Poètes...

     

     

    COMME UNE POIGNÉE DE DÉSERT NOIR

     

                                                                                     à Nimrod

     

    C’est toujours le premier pas qui compte,

    chante la pluie d’hivernage,

     

    le premier pas qui nous enseigne,

    quand il avance, à hauteur des plateaux,

    muscle de l’or.

     

    Les retrouvailles dansent sur le chaos

    le tour d’honneur des flamboyants.

     

    Fumeur de sable,

    au tam-tam des énigmes,

    tu en appelles aux peaux qui résonnent d’oublis

    et de retours.

     

    Une nuit d’amulettes

    souffle ses femmes vibrantes.

     

    Sur le nuage éteint du recommencement,

    le puits n’est jamais au centre. Vous marcherez.

     

    Pour nous montrer où va l’offrande

    d’un feu de brousse méridienne,

    demain encore,

    vous marcherez.

     

                                     DOMINIQUE  SORRENTE                                   

        (extrait de Pays sous les continents, MLD 2009)

     

     

     

  • Baudelaire hors les murs

     

     

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    L'étranger

     

    - Qui aimes-tu le mieux, homme enigmatique, dis? ton père, ta mère, ta soeur ou ton frère?
- Je n'ai ni père, ni mère, ni soeur, ni frère.


    - Tes amis?
-Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.


    - Ta patrie?
- J'ignore sous quelle latitude elle est située.


    - La beauté?
- Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.


    - L'or?
- Je le hais comme vous haïssez Dieu.
-

    - Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?


    - J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les

    merveilleux nuages!

                  Baudelaire: Petits poèmes en prose, I (1869)


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