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Le Scriptorium - Page 124

  • Contre ce mur - Marcel Migozzi

     

    Portrait unique parmi d’autres 

     

     

    « vigne vierge d'automne      comme

    monte à la vie

    le sang enflammé d'éphémère »

     

    Marcel Migozzi 

     

     

    Il dribble. Il prend plume. Il fait des appels de balle. Il aligne ses vers : une passe en profondeur, un contre-pied, il travaille son  droit et son gauche, son jeu de tête, sait-on jamais. Il décroche d’une ligne à l’autre. Il rature, quelques brins d’herbe feront l’affaire. Rien d’oublié, mais il macère pour trouver liqueur à son goût. Match après match, livre après livre, il y va de son corps à corps gourmand, tenace, généreux. Il accroche son obsédante prise au vestiaire , rêve d’une équipe indéfectible. 
     

    Mots et ballon : ce sont facettes du même jeu qui n’admet pas de temps mort.   Ah, celui-là, l’affreusement nommé, on le mettra en quarantaine dans un recoin de feuilles. Mais rien n’y fait, dit  le maître éphémère du jardin. Il faudra bien lui consentir, à la sauve-qui-peut. 
     

    Alors, que lui dire à ce compagnon d’écriture qu’il n’ait déjà scruté dans ses feux de broussailles ? On est seul et voué. On va dans les griffures. On est tous à genoux à respirer l’herbe de femme. On s’éprouve désorienté. On est en chambre d’observation dans ce mot à mot aléatoire qu’on barbouille volontiers  d’encre et de poisse.

    Et pourtant, pourtant… 
     

    On écoute en enfants de toujours les voyelles épelées qui nous parlent et nous relient.

    On ne repousse pas la nuit et ses saccages ; on la froisse ensemble du regard.

    Incapable d’un vin menteur, on s’attable bon prince avec les années. On laisse glisser des larmes sauvages sur les joues. D’une peau de cyprès touché, on peut recommencer le monde.

    Sur un bord de rivière, on conjugue le verbe. 

    S’émerveiller. 

    Marcel est de cette trempe-là. Nous ne lui dirons jamais assez, en réponse à ses mots si précieux qu’il nous confie sur le papier d’écolier de sa vie de toujours enfant. 

    Notre terre commune alors n’est pas si loin. 
     

                                  Dominique Sorrente 

     

    (Une première version de ce texte a paru dans la revue Encres Vives- hommage à Marcel Migozzi) 

     

     

     

     

    Jannis Kounellis_couteaux.jpg

     

     

     

    contre ce mur

    l'échelle en bois couleur de l'os

     

    on est tombé

    dans un jardin de malemort

     

    qu'a-t-on perdu dans une boue

     

     

     

    à chaque instant de doute        un mur

    comment le franchir sur l'instant

     

    en vérité ne se dit plus

    qu'avec retard      et seulement

    dans la boue murée de l'instant

     

     

    Marcel Migozzi

    (inédit Scriptorium 2009)

     

     

     

             Marcel Migozzi est né à Toulon en 1936, dans une famille ouvrière d’origine corse. Il vit au Cannet des Maures dans le Var.

    Lauréat du prix Jean Malrieu en 1985, du prix Antonin Artaud en 1995, du prix Des Charmettes / Jean-Jacques Rousseau en 2007, il a publié de nombreux ouvrages de poésie chez de nombreux éditeurs, en France et à l’étranger, collaboré à de nombreuses revues, ouvrages collectifs, anthologies.

     

             Parmi les ouvrages les plus récents, on citera : Un rien de terre (L’Amourier), Ensemble d’être (L’Arbre à paroles), Au rouge-gorge suivi de Mottes (Estuaires), Des traces dispersées (L’Harmattan), À qui le corps ? (Tarabuste), Dans les fermes, ça fume encore (Potentille), Dix solitudes (La Porte), Nouvelle histoire de la rosée, en collaboration avec Ludmilla Podkosova (Editinter), Et si nous revenions, sans vieillir (Encres Vives).

     

     

  • Lecture - Rencontre avec Dominique Sorrente

     

     

     

     

     

     

    Les Éditions MLD

     

     

    ont le plaisir de vous inviter

    à une rencontre - lecture

     

     

    avec Dominique SORRENTE

     

     

    à l'occasion de la parution de

     

     Pays sous les continents, 

    un itinéraire poétique 1978 - 2008

     

     

    Samedi 5 décembre 2009

     

    18 h 00

     

    à la librairie LES ARCENAULX

     

    salle Rimbaud
    25, cours d'Estienne d'Orves
     13001 MARSEILLE
     
    SIGNATURE_LECTURE_PAYS_SOUS_LES_CONTINENTS__SORRENTE.jpg
    (cliquer sur l'image)

     

     

     

     

     

     

    J' attends cette aube

    ajoutée aux pierres,

     

    étendue à tous,

     

    universelle.

     

    J' attends cet arbre,

    jumeau du feu,

    qui rêve sur l’oreiller d’emprunt

    depuis le jour enfoui de ma naissance.

     

     

     

     

     

     

     

    NOTE DE L’ÉDITEUR

     

     

     

    Sorrente adossé à l'arbre - DIDIER LECLERC atelier N89.JPGNé à Nevers en 1953, Dominique Sorrente vit à  Marseille. À 17 ans, il y a rencontré son « frère aîné en poésie » Christian Gabriel/le Guez Ricord ; plus tard, encore étudiant, il a fondé la revue Avalanche. Dans les années 80, il a été l’un des premiers auteurs de Cheyne éditeur et a trouvé dans la revue Sud un autre lieu d’ancrage. Depuis 1999, il anime l’aventure d’un lieu-dit de poésie, le Scriptorium. Autant de signes qui attestent le goût de susciter  de « petites utopies »  avec les mots à partager.

     

    Ce rôle de passeur de poésie que Dominique Sorrente s’est assigné par désir de mettre la poésie en mouvement au cœur de la cité ne doit pas pour autant occulter l’autre versant. Il s’agit du travail de création personnelle qui, à l’écart des modes, se déploie à la façon d’un journal de bord où se consignent ses humeurs insulaires.

    Or si celui-ci a donné lieu à de nombreuses publications en France et à l’étranger, a fait l’objet de reconnaissances (Prix GLM, Bérimont Artaud, L.Guillaume...) et éveillé un intérêt critique, il manquait encore un lieu qui permette au lecteur de mieux saisir ce qui fait l’originalité d’une telle écriture.

     

    « Pays sous les continents » comble ce manque. Car l’ouvrage ne constitue pas seulement un livre de plus dans le parcours fertile de l’auteur mais une halte signifiante  puisqu’il s’agit ici d’offrir des repères dans une traversée de trente ans d’écriture  (1978-2008).

     

    Depuis Citadelles et Mers jusqu’à la Lettre du Passager, le lecteur découvrira ainsi le cheminement d’une voix d’aujourd’hui qui conjugue l’évidence et la complexité, une sobriété classique et des ruptures inventives, l’esprit troubadour et la pratique des sagesses du monde, la forme resserrée de l’instant et l’échappée du rythme. Une écriture en variations, empreinte de surprises, de sourires, de mystères et de ferveurs.

     

    Comme Jean-Marie Berthier l’indique dans sa préface : « On ne sort pas intact de la lecture du Pays sous les continents mais l’on se surprend à résonner de mille échos, porteur de chants d’oiseaux perdus et retrouvés, (…) ou bien encore témoin investi du passage de la lumière, en des lieux peu souvent fréquentés par elle ».

     

    La poésie ici surgit où l’on ne l’attend pas. Car elle est navigation amoureuse, poussée secrète du désir humain, « pays sous les continents ».

     

    Le manuscrit de cette anthologie personnelle a reçu le prix du Conseil général des Bouches-du-Rhône.

     

     

     

    © Portrait - photo Didier Leclerc, Atelier N89

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    PAYS SOUS LES CONTINENTS

      Un itinéraire poétique 1978-2008

     

    Dominique Sorrente

     

    MLD Éditions 

     

    Pour toute commande :

    Mérédith Le Dez

    16 rue Beaumarchais - 22000 Saint-Brieuc

    editions-mld@orange.fr

    Tel/fax : 02 96 60 81 10

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Déborah Heissler, quelques éclats imperceptibles

     

     

    On peut croire que la vérité poétique remue souvent d’heureuse façon à vouloir sortir du puits en parure de beau mensonge, comme le suggérait Eluard. Chez Déborah Heissler, on aura raison de penser tout autrement : écrire y est acte de justesse, jeu de nuances et d’harmoniques qui se méfient de l’ingouvernable excès. Ce que le poète détaille relève de la suggestion, des empreintes à laisser à l’esprit, d’un mouvement de lecture pénétrante soulevant un peu de beauté fragile. Il lui importe, me semble-t-il, par-dessus tout, de confier, où elle les a rencontrées, quelques paroles justes, et comme obtenues, qui éclairent le carré du veilleur. « Rien que cela »  pourrait bien en être sa maxime… Si donc il y a des héros dans cette durée poétique qu’énonce le poète, ils se trouveront, à la faveur des éléments, moins hommes que lents gestes de la nature observée, accueillie. Et si des légendes se cherchent, elles se dénoueront à la fortune de nuages ou de « plis de l’herbe », de ces éclats imperceptibles qui révèlent par exemple un corps et son absence.

    C’est à chaque fois donner un peu plus de jour à la part la plus minime, celle qui, paradoxalement, est la plus susceptible de nous montrer le monde que nous nous employons si obstinément à cacher.

    Beau programme alors que d’explorer le verbe japonais akasu, quand la tâche est de susciter ce « quelque chose qui est à la limite de l’informulé, que seuls deux ou trois mots suggèrent et qui pourtant éclate à l’esprit ».

    Pour découvrir Déborah Heissler on peut lire Près d’eux, la nuit sous la neige, (Cheyne), qui a reçu le Prix de la Vocation 2005.

     

    Dominique Sorrente

     

     

    Cerisier du japon.jpg

     

     

     

    C’est un adieu                           dans le ciel

     

    ce sont des fleurs, des  lam-

    beaux de feu, tandis  que le

    lointain  devient  plus  rose,

    plus doré, plus lumineux. Je

    rapporte des fruits sauvages.

    Maintenant, c’est la douceur

    qui   reprend,       tandis que

    l’écho présent est celui   des

    larmes.

     

     

    Combien de jours à présent,

    sur les branches nues avant

    la fleur et le fruit ?

     

     

    Déborah Heissler

     

    Extrait d’Akasu,

     (inédit, à paraître chez Cheyne éditeur, 2010)