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Le Scriptorium - Page 89

  • SAISIES DU BRUT (extraits) par Laurence VERREY

     

     

    Et toi,

    par cette nuit qui vient frapper à la tourbe vive de tes os,

    ta seule tâche est de tendre la main vers le crayon

    resté en attente comme un petit coursier sous le vent.

    De le saisir et de l’éperonner.

     


                        Afin qu’il te prenne à vive allure, à la poursuite de la brûlante vie dont les feux sont encore invisibles et que tu découvriras sur ta route

           dans le déroulement des temps.

     

    Que ton cheval emballé mette son galop au diapason du soleil et irradie de lumière tout un troupeau en marche.

     

                                                                       

    cavaliers au désert.jpeg

     


    Prends la page blanche comme la peau d’un tambour.

               Frappe-la doucement. À l’égal de gouttes de pluie.

     

    Ces petits riens que sont les mots, comme une averse provisoire.      

                   Ici bat un pouls minuscule.

        Tes peurs se sont évaporées.

     

    Minuit fidèle sonne et sépare les douleurs,                                       cloche de nuit,

    troubadour de l’axe lunaire

    trop vite disparu dans l’air  

    et pourtant frappeur infatigable des heures.

     

    Écris de nuit les yeux fermés, écris jusqu’au rire de chute.

     

                   Tous feux éteints, jusqu’à un improbable repos.

     

      

    LAURENCE VERREY


     

    dessin d'un cavalier.jpeg






     

  • UN TOUR DE PISTE AVEC LES FOLIES DU MONDE

    LA RENCONTRE « INTERVALLE » sur les Folies du Monde s’est tenue ce samedi 7 décembre après-midi.

     Failles de l’esprit, débordement, folie douce,  mots ruptures : l’écriture a bien des choses à dire aux déchirements qui traversent notre temps comme notre vie personnelle.

    À chacun de tracer à l’encre sa diagonale du fou plus ou moins zigzagante…

     Autour de la table du jour, nous étions une dizaine de fervent-e-s pour explorer un peu de ces voix déchirées, de ces paroles qui tournoient, de ces regards aux prises avec le chaos. 

     

    HieronymusBosch La pierre de folie.jpg


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  • LES FOLIES DU MONDE du côté des scripteurs

     

    Ci-après, quelques contributions recueillies sur le thème du jour. 

    Intervalle prolifique de ce 7 décembre où il fut aussi question des naufragés de Lampedusa, du corps de Toutânkamon, de la boîte de Pandore, de Fernando Pessoa sortant la nuit sous ses lunettes noires, d'Andrée Cheddid loin des berges stridentes, sans oublier l'Annonce faite à Marie donnée par la Compagnie de l'Égrégore.

     

                                                                   * 

     

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    à Ossip Mandelstam

     

                                             Je marche


    Je marche

    Pieds à pieds

    Les pieds nus

     

    Vers ce ciel

     

    Sur une échelle

     

    Aux multiples barreaux ornés de poignards

     

    Une lourde pelisse à mes épaules

    Rejetant loin

    Ce siècle fauve

    L’odeur fauve

     

    Le cadavre de la raison

     

     

    NICOLAS ROUZET

     

     

    *

     

    SNB11284 - copie.JPG


     

    S'asseoir, debout, marcher

     

    S'asseoir, debout, marcher.

    Cela fait un certain temps déjà que bruissent autour de moi mondes et contredanses. Je le sais quand mon front s'alourdit, quand s'affirme avant toute autre chose le sentiment de chute. Je me repère alors aux yeux de cette femme, qui valse seule et qui, tour après tour, semble dicter ma conduite de son regard direct.

     Elle n'existe pas ! Elle n'existe pas ! Je dois frotter fort mon front de mes mains ; je dois circonscrire ce petit mal avant de trébucher les pieds gourds de peur.

     Cela passe par l'exploration minutieuse des recoins, le soin apporté au remue-ménage. Quelle est cette question qui se pose sans cesse, revient, s'oublie, revient, s'oublie mais laisse son souffle déposé un peu partout ?

     

    De part et d'autre du clos

    Qu'est-ce que mon regard ? Dois-je lui confier mon abord des choses ? Dois-je le penser comme un élément nécessaire du mystère ?

     

    Je vais mon chemin. Je lis. Je parle. J'écris. Je mange de bons petits plats. J'aime. Je n'aime pas. J'entre. Je sors. Je suis ému.

     

    Qu'est-ce qui est vrai ? Je questionne chaque lueur. Je questionne jusqu'au battement de mon cœur. Puis j'oublie.

     

    Le point focal décide du constat. Rien n'existe si je ne le sais, si je ne le prends par l'œil, si je n'incise la scène et l'arrière-rideau, soumis à l'impression et à son excision, dans l'écartèlement du cerveau.

     

     Achevé sous un cèdre

    Toujours au pied du mont. L'écume jaune preuve d'échec. Nulle eau ressurgie du gouffre. Serai-je proie  au gré des fauves ?

     

    Sur la crête, l'abrupt noir d'arbres mis en frontière, l'azur propice au rapt.

     

    A l'instant, je suis aigle. Le vaste espace et ses vertiges sont envolées  sauvages.

     

    Belle illusion. Nécessaire illusion. Aigle ou simplement homme serein, savoir le croire par instants. S'échapper du trop vrai, du trop cru, de l'addition strictement sue.

     

    Je viens de terrasser tout un jardin. Le vent, doux, joue avec les herbes encore vivantes. Un fond d'eau dans la bouteille évoque toute source.                                                         Pourquoi ces roses-là sont-elles  si rouges ?

     

                                                                           OLIVIER BASTIDE

     

     

    *


     

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    La vocation du fou

     

    Ô vous, tireurs de biais, honorez-le. À lui seul, l’honneur des astigmates !

     

    Au pays du bizarre,  la reine volontiers le dépêche.

    De naissance et pour la fin du jeu,  il tracera ses lignes, corridor  tout en blanc, corridor tout en noir, comme le sort l’aura jeté.

     

    Destin voué. On ne métisse pas la folie, on la traverse de bord en bord.

     

    Un fou n’en cachera jamais un autre.

     

     

                                                                DOMINIQUE SORRENTE

     

                            ( extrait de Le Jeu d’échecs et du mat, Pays sous les continents, MLD, 2010)

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