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Le Scriptorium - Page 27

  • RETOUR GAGNANT SUR LA CARAVANE DU SCRIPTORIUM du 24 avril 2021

     

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    L'homme a beau parcourir les mers, le ciel change, mais non son âme

    ( citation d' Horace, trouvée en graffiti à l'entrée de ce porche

    situé sur notre parcours de Caravane poétique du Scriptorium ,

    à côté de la dernière habitation de Christian Gabriel/le Guez Ricord)

     

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    Dominique Sorrrente lit Louis BRAUQUIER, près du quai Rive Neuve

     

    Que fut la caravane poétique urbaine du 24 avril à Marseille ?

    Un mistral encore bien présent qui eut le mérite de chasser les velléités des nuages mais proposa en début de parcours un défi de Stentor aux orateurs du moment...avant de s'apaiser. Un public participant, curieux de connaître et aussi heureux de se retrouver à plusieurs ( des petits groupes avaient été formés pour respecter les mesures sanitaires et favoriser les échanges ).

     

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    Couverture (par Johanna Heeg) du numéro 23 "Marseille, terrain vague" de la revue des ARCHERS , 2013

     

    En ouverture, devant la librairie-galerie des Arcenaulx, Dominique Sorrente fit lecture d'un extrait du superbe numéro 23 de la revue des Archers (née au Théâtre Toursky, il y a vingt ans, et pleine d'une énergie nouvelle aujourd'hui ), nommé "Marseille, terrain vague". Plus d'une vingtaine de personnes       ( auxquels, ça et là, venaient se mêler des passants...) ont ensuite suivi l'insolite cortège des amoureux de poésie du cours d'Estienne d'Orves au Vieux-Port, puis devant les greniers des Cahiers du Sud quai Jean Ballard.

     

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    Au retour de la rue Pythagore après la halte Gerald Neveu

     

    Durant tout ce parcours, bien des personnalités furent évoquées, notamment les poètes, les écrivains autour de Jean Ballard qui firent des Cahiers du Sud une revue majeure en littérature durant plus de 50 ans. André Gaillard, Léon Gabriel Gros, Simone Weil, Gabriel Audisio, Louis Brauquier...

     

    À côté de Dominique Sorrente, on put entendre l'éditeur-écrivain Jacques Lucchesi lire un extrait de Je connais des îles lointaines de Brauquier, près du Vieux Port. Puis c'est la photographe Marjolaine Heeg, aimantée par la poésie depuis quelques années, qui prit le relais pour une halte pleine, consacrée à Axel Toursky. Devant un beau demi-cercle ouvert, elle sut dire, avec un naturel plein d'émotions et beaucoup d'élégance, comment elle avait retrouvé le chemin de Toursky, grâce à Richard Martin, fondateur du théâtre qui porte son nom, puis en téléphonant à Anne-Marie Toursky, femme du poète, tout émue d'évoquer ses années amoureuses à Marseille...Un saut dans le temps en forme de rebond.

     

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    Marjolaine HEEG évoque le poète AXEL TOURSKY

     À la porte du 62 de la rue Sainte, Dominique Sorrente évoqua la figure de Jean Malrieu, le fondateur de la revue Sud (1970-1997), les rendez-vous du mercredi, son compagnonnage avec Frédéric Jacques Temple, Yves Broussard, Jacques Lovichi, Jean-Max Tixier, André Ughetto, Jeanine Baude...le numéro-culte Méditerranées...avec, entre autres, les premiers poèmes publiés par Antoine Emaz.

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    Couverture du numéro 64/65 "Méditerranées" de la revue SUD -1986

     

    Le groupe remonta ensuite jusqu'à l'habitation dernière d'un poète invraisemblable et beaucoup trop méconnu encore, Christian Gabriel/le Guez Ricord (1948-1988), auquel Dominique Sorrente prêta sa voix, notamment dans une lettre adressée à Yves Bonnefoy. Il fit également partager quelques souvenirs ardents de cette époque des vingt ans partagés à Marseille, nouvelle Éphèse. On nota la rencontre fortuite et très amicale du maire de secteur qui écouta la séquence avec une réelle curiosité, découvrant une page précieuse des rues de sa ville qui mérite d'être connue. Puis ce fut la montée jusqu'à l'escalier André Suarès où Charlotte Hamer lut, d'une voix chaude et claire, résistant à la circulation environnante, deux textes sur Notre-Dame de la Garde par mistral ( tiré de Marsiho) et sur le livre "dernier refuge de l'homme libre".

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    Charlotte Hamer lit ANDRÉ SUARÈS

    Plus haut encore, l'escouade grimpa jusqu'au cabanon de Gerald Neveu sur les hauts de Vauban, rue Pythagore, une des ces rues à escaliers dont ce quartier est friand, Nicolas Rouzet et Marc-Paul Poncet évoquèrent, chacun à son tour, de façon sensible, le chemin bref et douloureux du poète de Fournaise obscure(1967), l'ami de Jean Malrieu.  Enfin par le Bois Sacré, gorgé d'orties de saison, la petite troupe fit retour jusqu'à la montée de l'Oratoire, sur la colline Notre-Dame de la Garde pour un ultime partage autour d'une collation. Avec une mini-exposition privée surprise sur Christian Gabriel/le Guez Ricord.

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                          Christian Gabriel/le Guez Ricord - collection particulière

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    REVUE SORGUE, n°2, editeur LE BOIS D'ORION, 2000

     

    Ce 24 avril, la Caravane poétique du Scriptorium eut donc sa route, ses étoiles, ses oasis, son caravansérail. Un plaisir nomade de "faire poésie".  Elle a surtout montré ce qu'elle était: un geste accompli au-delà du temps pour relier par la poésie la mémoire des émotions et le présent incandescent.

     

    Caravane urbaine dans un espace inspiré.

    Il y en aura d'autres sûrement, ici ou ailleurs. En ville ou en campagne.

     

    Et on entendra encore les mots d'Axel Toursky au fil du chemin:

     

    "Si je passe mes rues,

    si j'accomplis mes actes,

    c'est pour suivre des traces

    et non pour avancer.

     

    Puis-je à présent le dire ?

    Ici la poésie

    tenait pour nécessaires

    les lilas et les roses."

     

     

                                                    Anne LOFOTEN

     

     

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    MORCEAUX CHOISIS

     

    À propos des Cahiers du Sud

     

    "Les Cahiers vont et viennent avec ses navires en suivant les pulsations de cette métropole de la mer. Ils publient la même année le Pèse-nerfs écrit par le fils d'un armateur marseillais, Antonin Artaud, et la Liberté des mers, poème de Louis Brauquier, pour ne citer que deux natifs de Marseille. Sous l'Occupation, le perchoir des Cahiers servit de lieu d'accueil aux exilés, réfugiés en zone libre".

      

                          Jean Ballard, fondateur et animateur de la revue

     

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    "C'était le dernier asile pour les gens de notre espèce"

                                                   Anna Seghers (Transit)

     

     

    « De tous les poètes, vous êtes celui dont je voudrais avoir tout  l'œuvre dans le cœur. »

     

                        Joe Bousquet, lettre à Axel Toursky

     

    poème de GERALD NEVEU 3ca8fd9-3445-4d72-ba98-730ab583b364.JPG

     

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  •  FAIRE CARAVANE POÉTIQUE: NOTRE PRIMITIVE PASSION par Dominique Sorrente

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    « Les rues ont des noms, des numéros. À chaque numéro, aux façades, les noms de ceux qui y vivent. D’autres vécurent, d’autres vivront.
    Entre les murs, croisons les fantômes du passé, l’ombre de l’avenir. Les immeubles parfois s’effondrent. Tout comme les civilisations. Faut-il reconstruire ? Est-ce encore possible ?
    Avec un peu d’attention, quelques gestes d’humanité ou de langage, on aimerait colmater les brèches, poser des pansements dérisoires sur les plaies ».

     

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    Ce beau témoignage de Nicolas Rouzet à son retour d'Ulysse massaliote, dit fort sensiblement ce qu'a pu être la caravane poétique du Scriptorium le 24 avril à Marseille.

    Un pari audacieux, alors que la pandémie continue d'étirer son ombrageux ciel de traîne...Et pourtant un besoin, une nécessité de se retrouver en chair et en os, de réaliser un geste poétique en commun, comme nous le proposons au Scriptorium depuis plus de 20 ans. Ici, pérégriner à plusieurs, dans les lieux de Marseille où vit la mémoire des poètes, aller d'un point à un autre, dire des poèmes à chaque halte, prendre des voix et des voies de traverse, mêler le "pas gagné" de Rimbaud à la magie des mots prononcés à l'air libre. Croire à la confluence entre la chambre d'écriture et la marche à ciel ouvert.

     

    Or, dans ce temps de pandémie si souvent délétère, qui fait la part trop belle aux replis, empêchements de toute nature et aux mille raisons de renoncer, dans cette période de vies blessées, bloquées, et qui se perdent de vue si facilement, il m'a semblé, plus que jamais, nécessaire de faire Caravane. Et pour prouver par le réel que cela avait du sens, j'ai conçu un parcours dans Marseille. Marseille-en-poésie, autour de la "rive neuve" et vers la colline de Notre Dame de la Garde. Un parcours pour réveiller la mémoire de nos devanciers. Dire que le poème fait signe tout autour de nos quotidiens, et que, pour nous, si souvent hypnotisés par le saccage et la saturation des écrans, seul manque l'innocence retrouvée des yeux et des oreilles.  Pour aller au poème, et boire aux "fontaines de l'inspiration" comme l'écrivait AE.

     

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    Le 24 avril, c'est comme cela que tout a commencé. Sur une place minérale à l'italienne, avec des lampadaires à la place des arbres. Un canal disparu. Et la promesse de graines à jeter, de mots à troubler les regards assagis. Un goût d'effervescence.

     

    C'est comme cela que tout commence toujours en poésie.

     

    Par le vent, seul vrai maître des lieux, qui nous somme de parler haut et fort, par la jubilation de croiser les mots et les instants, par les gens qui se rassemblent et écoutent du fond des âges les voix des poètes qui nous précèdent et nous font signe: il y a du sens infiniment à vivre ainsi.

     

                                     Dominique Sorrente

     

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         (pins rue Pythagore, au-dessus de l'habitation de Gerald Neveu

            où selon Jean Malrieu se retrouvaient "les poètes de Vauban") 

     

  • DANS L'EUPHORIE DES MOTS RETROUVÉE, MARSEILLE BATEAU IVRE...

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    "On ne doit jamais manquer de répéter à tout le monde les belles choses qu'on a lues."
      Sei Shonagon

     

             Rappelons-nous. Il y a un an, c'était la dure annonce du confinement. Dans la sidération de ce moment, les poètes du Scriptorium, réuni.e.s autour de Dominique Sorrente, avaient dû renoncer à vivre leurs "Morceaux de bravoure". Frustration de la privation de parole poétique en public. Personne à l'époque ne pensait que ce temps d'empêchement durerait avec toutes ses péripéties...

     

    Mais voilà, mieux qu'une revanche sur le temps empêché, cette fois, quelque chose a eu lieu ce 21 mars plage du Prado Roucas à Marseille. Une vraie promesse tenue de printemps.  Un INSTANT BATEAU IVRE SALUTAIRE sur et autour de ce monument créé pour saluer Rimbaud, à l'occasion du centenaire de sa mort tragique à l'hôpital de la Conception.

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                                                       article du journal La Provence du samedi 20 mars 2021

     

             Pour qui ne le connaît pas, ce Bateau Ivre, en béton de basalte est un massif de pierres rouges qui se laisse escalader par les enfants aussi bien qu'admirer par les passants- quand ceux-là choisissent de de ne pas l'ignorer. Depuis 20 ans, il est devenu le véritable totem des poètes du Scriptorium. Et ce 21 mars, il était investi de bien belle manière.

     

             Convergence des causes : le dernier acte du Printemps des poètes était aussi la  date de la journée mondiale de la poésie (Unesco). Restait à savoir si le public répondrait. Mieux qu'une réponse, une communauté provisoire s'est formée, des gens qui avaient retenu le mot "poésie", le nom "Rimbaud" et qui avaient tout simplement envie de se laisser surprendre autrement qu'en nouvelles déprimantes. Dominique Sorrente, en maître de cérémonie anima la rencontre avec Emmanuelle Sarrouy, alternant les prises de parole vigoureuses ( le poème "J'ai pris ma part") et les invitations à écouter la variété des voix.

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             Un poème "Passagère clandestine" fut dit pour saluer les poètes récemment disparus, Serge Bec, Lawrence Ferlinghetti, Philippe Jaccottet, Joseph Ponthus, Jean-Jacques Viton, ainsi que l'interprète des poètes, Hélène Martin.

     

    Puis ce fut le temps d'un bel hommage à Baudelaire ("fringant bicentenaire") qui permit de découvrir ou retrouver les voies classique (Correspondances), ou plus énigmatique (L'étranger), sans oublier les pas de côté (Un poème-épistolaire de Raymond Carver en pélerinage sur la tombe de Charles Baudelaire, lu par Emmanuelle Sarrouy), et aussi les textes de tempérament, véritables coups de sang du poète de Mon coeur mis à nu, l'ouvrage posthume dont certaines formules continuent de faire mouche aujourd'hui.

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    Mais sur ce monument, à quelques mètres de "la mer allée avec le soleil", comment oublier Rimbaud ? Le comédien Emmanuel Franval proposa sans appui une interprétation sensible et mouvementée du long poème du Bateau Ivre, histoire de nous rappeler le verbe génial de l'enfant de Charleville. S'en suivit une valse de prises de parole les plus diverses.

     

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    Pour certain.e.s c'était le baptême du feu... et zéro sono. Certaines phrases ont dû s'envoler loin des oreilles du public, mais l'important était ailleurs. Une suite de textes personnels (Marjolaine Heeg, Henri Gustin, Charlotte Hamer, Olivier Bastide...), des auteurs du répertoire ( Rutebeuf, Verlaine, Rimbaud encore...), des poèmes venus de pays divers choisis par Wahiba Bayoudia (le Rocher en feuilles de Boukany Dioura, le Naïf et l'Équipe de Malick Fall...), des murmures, des mots chantés, criés... On ressortit même le mot "déclamer", bien loin de la "voix blanche" à la Bresson...Tel est le lot des scènes ouvertes qui ont pour rôle d'accueillir la diversité des expressions à un moment donné. Dans une période si pleine de frustration, on en sent la nécessité.

     

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             Commencée à 15 heures, sans même le quart d'heure de grâce -tant il y avait de l'impatience dans l'air- la rencontre s'est terminée autour des 17 heures 30. Il faut dire qu'était apparu un nouveau participant, le mistral. Discret pendant une bonne partie de l'après-midi, il se fit plus insistant en fin de partie, les derniers résistants se collant à la paroi chaude du Bateau Ivre pour prolonger leurs lectures.

     

               Symbole de cet instant sans frontières : une jeune enfant kurde inconnue est venue se placer, au début de la rencontre, tout à côté de Dominique Sorrente. Elle n'a prononcé aucun mot, mais elle est restée là, longuement, debout, face au public, devant la mer, avec son sourire fier et sa jolie robe de fête. Qui était-elle ? Nous ne le saurons sans doute jamais. Elle était à sa manière l'incarnation de cette "passagère clandestine" évoquée dans un poème d'À la digue du large ( éditions Tipaza).

     " Mes fleurs à partager,

    mes carnets de déroutes et de chances reçues,

    libre de cœur, j’aime celle ou celui

    qui  crie récompense 

    pour le temps d’amour qui viendra."

     

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    "J’aurais désiré que cette splendeur durât mille années."

    Sei Shonagon, Notes de chevet (1002)

     

                                                    Anne LOFOTEN

     

                  Les photos sont d'Emmanuelle Sarrouy et de Régis Dallaporta

     

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       Prochain rendez-vous public du Scriptorium :

    la CARAVANE POÉTIQUE : samedi 24 avril.  Parcours encore secret... à découvrir prochainement !

                           

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