17 octobre 2016
2 poèmes-stèles et le vent...
Tu ne m’as pas dit où tu étais.
Peut-être ne le sais-tu
plus, toi-même, quand tu tentes
de descendre le long de mes yeux.
Mais j’apprends la leçon secrète, au jour le jour.
Tu ne m’as pas dit où tu étais pour que j’évite de trop fixer les dalles.
Et aussi, pour que je continue de me laisser surprendre
par le vol d’un papillon quand il traversera,
ça ne saurait tarder,
l’autre versant de cette fin d’après-midi.
*
Quand tu apparais dans ma vie,
il y a une danse au milieu de la pièce
qui me précède, et toi
qui penches déjà la tête,
tu es au centre du tableau,
tandis que le creux de l’épaule
vient peu à peu vers toi pour t’offrir
tout le repos de tes années.
Une chanson
tourne sur son disque
l’introuvable des consolations.
Une toile de neige,
un fond d’enfance,
c’est la terre
où la fatigue alors n’a plus de prise,
la terre saisie dans son étoile
qui nous revient.
à Patricia, cinq ans après le 17 octobre 2011
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29 février 2016
AU BISSEXTILE PASSANT
jeu calendrier imaginaire- collection particulière- photo Lino Cannizzaro
Je salue l’intrus, l’insolite, le trouble-drame,
le jour qui sait se faire attendre,
l’intermittent des cycles,
je salue le doux ralentisseur de l’année,
le si reconnaissable
parce qu’il sait se cacher,
le qui vous dit :
je passe ici, remarquez-moi ou bien
tant pis,
je reviendrai sans doute,
mais ce sera une autre époque,
je salue
le petit virtuose des heures incomplètes
avec son art d’arrangements,
celui
qui n’était pas invité
et a trouvé sa place dans le gâteau du temps,
le bricoleur créatif des mesures,
l’inventeur du quadriennat secret
qui ne se montre qu’une seule fois dans son mandat
pour respirer l’air alentour,
le candide du château de sable éphémère
sur le goudron des tas d’urgence,
je salue le bissextile
qui ne demande rien
qu'à glisser son jour anniversaire
dans les failles du temps à vivre.
À dans quatre ans, l’ami,
quelque part ici ou là...
Dominique Sorrente
au 29 montée de l’Oratoire,
ce 29 février 2016
11:55 Publié dans Le sens de l'humeur | Lien permanent | Commentaires (0)
20 janvier 2016
POURQUOI LE POÈME AUJOURD’HUI
Notre époque, passionnante par bien des aspects et riche de promesses multiples, est en train d’engendrer dans le même temps une galerie de monstres, à la prétention de veaux d’or. Parmi eux, la marchandisation de l’intime et le dévoiement du religieux. La première chasse la gratuité dans les moindres recoins de l’âme humaine pour l'habiller en offre financière. Le second arrache à l’acte de se relier ce qui lui donne sens et mystère et le remplace par un geste de rapt institutionnel.
Dans ce contexte, l’enjeu de la liberté poétique, conscience et parole autonomes, redevient plus que jamais une cause sacrée. Contre les mots de la rhétorique à sang froid (les verbiages des process et autres langues désincarnées des spécialistes), contre les mots des propagandes (il y a, par exemple, en ce moment, une poétesse de Daesh qui fait fureur dans les vidéos d’endoctrinement des candidats djihadistes), nous revendiquons le rôle insolite du poème. Celui de poil à gratter, tension d’une parole ouverte, indocile, espace pour une mise en mots, lacunaire mais fervente, du sensible dans toutes ses vibrations.
Le poème, lieu d’interactions surprenantes et de vraies retrouvailles pour le cerveau humain, dont toutes les recherches les plus récentes nous indiquent qu’il est, à tous les âges de la vie et jusqu’à son terme, en quête de plasticité.
Le poème à l’instinct joueur, comme le savent les enfants de toujours. Capable de lever des mots intenses et prodigieux qui appartiennent à tout le monde. Le poème, passeur des secrets publics, des paroles réfractaires et inventives. Visage de consolateur ou d’insurgé, ami des manques et des chemins de traverse, le poème à l’humeur de pochette-surprise du monde qui naît, avec lui, à cet instant. Poème, toujours sans façon.
Lisez, écoutez, écrivez, parlez, dansez des poèmes.
La vie, votre vie n’attend pas.
Dominique SORRENTE
06:21 Publié dans Le sens de l'humeur | Lien permanent | Commentaires (0)