« Je n’augmente rien
Je n’argumente pas
Je répète le peu de mots que je sais. »
Ainsi parle Jean-Yves Vallat, tout au bout du tracé qu’il emprunte sous le signe d’un apparent paradoxe, celui de l’Endurance du Météore (MLD, 2010).
C’est que la démarche ici n’est pas celle des fulgurants, non plus celle des immobiles.
Elle se situe dans un espace d’humanité, un entre-deux de l’existence, qui a les lèvres « effleurées par l’abîme » et qui sait en même temps voir « au bord du ciel bleu » comment « persiste l’avenir pour un enfant calme / aux mains d’herbes et de bois ».
Espace douloureux, auquel le poète ne consent pas facilement, mais où il nous entraîne, à pas fermes, mesurés, anxieux mais résolus, avec une forme d’âpre fidélité au seuil de la nuit.
Ce qui nous émeut chez Jean-Yves Vallat, c’est bien cette insistance à tenter une parole juste « à condition d’habiter les arbres », condition éthique autant que formelle qui se retrouve d’une page à l’autre. La figure de la mort y trouve une place centrale, avec une façon personnelle de laisser entendre, selon la belle formule de Mérédith Le Dez à qui l’on doit la préface, « un chant psalmodié dans l’obscurité ».
Une belle voix grave parcourt ce temps qui se sait à l’oubli, le vit déjà par anticipation, ramassant les témoins de la finitude pour nourrir le feu. « Mon absence est un préau où le vent se rassemble avec des feuilles de passage. », prévient le poète qui s’éloigne avec les images du temps, offrant ses lectures d’horizon ou ses carnets de « l’herbe ardente, quand tu seras sous la neige ».
À quoi bon persister en écriture si « rien ne s’ajoute au poème sauf le silence qu’il donne » ? Pour ce silence-là, justement, silence obtenu, partagé, apprivoisé comme cette porte derrière laquelle veillerait une voix », semble répondre Jean-Yves Vallat. Par le travail des "Cendres", et puisque « Les arbres ont un regard », il nous appartient d’entrer dans cet enclos. Peut-être pour ce rare instant d’un dimanche de lumière, à la dernière page du livre, où règne le verger dans un regard d’enfant « auprès d’un petit pommier d’un an ».
Oui, « Le météore n’explique pas le ciel
il le nomme ».
Il n‘en a jamais fini de tenter de le nommer.
Dominique Sorrente
Endurance du Météore est paru aux éditions MLD, 2010
Un extrait et notice biographique de l'auteur ICI
Du même auteur :
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Cendres, éditions de l’Envol, 1997, prix Yvan Goll
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Les arbres ont un regard, Le Nouvel Athanor, 2009