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Le Scriptorium - Page 33

  • J-1 DE NOUVEAUX POÈMES DE BRAVOURE pour le SCRIPTORIUM

    ISAVON lot délicieux.JPG

    Les Bulle de Charlotte

     

    Mardi 10 mars 2020 – Bulle de 8h35

     

    Eu égard à vos regards

    Mon idéal se porte bien

    Eu égard à vos blessures

    Mon idéal se porte bien

    Eu égard à votre vacuité

    Il germe et bourgeonne

    Sans maux dire

     

     

     

    Jeudi 19 mars 2020 – Bulle de 23h57

     

    Des egos se promènent

    Et se brisent sur la jetée

    Du ressac à l’hymen

    Un semblant d’éternité

     

     

     

    Jeudi 19 mars 2020 – Bulle de 15h12

     

    Comme un très long dimanche

    Coloré d’une pointe d’appréhension

    Des jours et des nuits arrogantes

    On lui fait la nique

    Gueule de bois virale

    Épaules basses et jambes coupées

    Brava brava la commedia

     

     

     

    Vendredi 20 mars 2020 – Bulle de 22h23

     

    Des germes combattants

    Musique et inflexions de voix

    Tout est bon pour tuer le temps

    Printemps par-ci

    Printemps parla et dit

    Sauvez ce qui reste

    Sauvez ceux qui restent

     

    Charlotte Hamer

    Luynes, mars 2020

     

    Justicia-Adhatoda.jpg

     

    ROUGIR VOS ÎLES

     

    Le vide m’aspire

    l’orage des marées met du chaos
    les filles folles n’ont plus peur des loups hissés dans la mémoire épaisse des eaux
    brumes et marais de leur visage

    bel or, ouvre un bouquet de bruyère allume les peintures
    relève
    tes jupes sur l’alphabet de tes marines tes langues tes lèvres écumeuses

    je sèmerai tant de mots au livre des pages brûlées

    sur mes savoirs distincts la mer étale ses fers sa roue s’emmêle
    au soleil et aux morsures d’oiseaux lassée des berceuses
    des abîmes

    et ils porteront mes yeux
    sur leur poitrine
    et une hache sur leur cou

    car l’homme doit mourir deux fois.  

    Henri Tramoy

     

    ***

    Au carnaval de la vie

     

     

    avait-on besoin d’

    un / virus meurtrier

    pour nous rappeler

    au chant des marées

    à la douceur du

    printemps naissant

    au rythme des sirènes et

    des matins dorés ?

     

    avait-on besoin d’

    un / virus meurtrier

    dans la grande gueule

    de la vie effrénée

    pour amorcer le virage

    en plein accéléré

    poser nos points de suspension

    en toute sidération ?

     

    avait-on besoin d’

    un / virus meurtrier

    pour enfin respirer ?!

     

    à Venise on rejoue le lac des Cygnes

    la danse est belle et effrénée

    d’un air de rien accompagnée

     

    dans les miroitements de la lagune

    sans un paquebot à l’horizon

    sans ces touristes et leurs avions

     

    commedia dell’arte dans les rues défigurées

    commedia dell’arte dans les rues réanimées

    commedia dell’arte de tout un peuple abandonné

     

    mais les nantis ont-ils seulement compris

    ce qu’est / le carnaval de la vie ?

     

     

     

    Emmanuelle Sarrouy

    Marseille, 21 mars 2020

     

                   IL N'Y AVAIT RIEN À DIRE...

     

    Il n'y avait rien à dire, ce courage il m'avait manqué et il me manquerait chaque fois que je respirerai cette même odeur ...l'odeur des ports croupissants sous des soleils d'acier, l'odeur du poisson pourri et des coquillages en voie de putréfaction.

    bigorneau videla déception du crabe privé de repas

    Le matin de la mort de mon homme dans son lit auprès de moi, sont venus dans l'heure qui a suivi d'abord le fidèle infirmier qui s'était occupé de lui durant ces longs mois d'agonie et de souffrances intenses, puis le cercueil et dans la journée ont afflué des dizaines de ses amis qui se sont succédé , 4 jours durant, avant que l'on puisse procéder à sa crémation.

    Comment n'ai-je pas compris dès le premier regard, plutôt l'absence de regard, comment n'ai-je pas compris qu'ils voulaient tous ma destruction ?Pourquoi ai- je continué à croire qu'il pouvait en être autrement ?Il fallait que je disparaisse, que je n'existe plus; l'unanimité en avait décidé ainsi.

    Pendant des semaines j'avais servi de bouclier pour les empêcher d'approcher, celui qui, moribond, refusé tout contact avec les autres...Mais peut-on en vouloir à un mourant ? Peut-on imaginer que cette personne festive et généreuse puisse désirer mourir sans ceux avec qui elle avait bringué toute sa vie ?

    Pour ces gens là, il était impensable, que n'étant plus que l'ombre de lui-même, tordu de douleurs inimaginables, il puisse désirer une seule chose: vivre ces derniers moments entouré des deux seules personnes comptant pour lui, son frère de lutte et son dernier amour.

    Nid de busedans le rocher des collines une place pour deux

    Douze mètres carrés de salon de cette minuscule maison perchée sur la colline, Son cadavre au milieu.Des ombres allant et venant nuit et jour.La froideur étincelante des ciels d'hiver.

    L'odeur de sa dépouille mêlée au parfum épicée d'une bougie Ma tristesse dans l'écho de leur brutalité.La violence d'une indifférence froide.La force de la vengeance d'un groupe.

    Et les heures s'ajoutant aux heures , les jours après les jours. L'oppression se mua en hallucinations.La faucheuse sur mes pasJe délirais seule parmi ces visages qui avaient été mes amis.

    Par-dessus l'épaulele scintillement fugace de la Mort

    Fuir la silhouette des fantômes.Leur laisser son corps en pâture.Ce cercueil ouvert aux hyènes affamées.Laisser derrière soi les ténèbres.Sortir de cette obscurité.Mon travail était terminé.Lui n'était plus rien, une enveloppe en train de pourrir dans une odeur de mer en décomposition. Le courage m'a manqué, j'ai cru que la bravoure était de rester.Ils m'ont mis en pièces et se sont acharnés.Violenter la vivante, ils étaient tous d'accordet jusqu'au soir de la crémation alors que tu n'étais plus que cendres ...

    .. Le courage m'a manqué...

    Oies sauvagespar-dessus les tuilesla nostalgie des beaux jours

     

    CLAUDINE BAISIÈRE

     

     

                                          Le 20 03 20 COURAGE

     

    IMG_2151.JPG

     

     

     

     

  • PASSAGERS DE LA TOURMENTE, POÈME Dominique SORRENTE

    Ce poème a été écrit en ce premier jour du printemps d'une année singulière. Avec une musique des Doors, revenue d'un autre temps, qui me faisait signe.

     

    Version youtube (non répertoriée):

     

    fichier son:
    podcast

    IMG_2366 LE COQUELICOT.JPG

    coquelicot solitaire sur la colline

     

    PASSAGERS DE LA TOURMENTE

     

     SOUDAIN IMMOBILISÉS

     

     

    Passagers de la tourmente, soudain

    immobilisés,

    nous nous retournons,

    la route tout d'un coup n'est plus là,

    la mer si proche interdite.

    Rentrez chez vous, beugle le haut-parleur.

     

    C'est la rumeur qui, cette fois, a les yeux rouges

    et ne ment pas,

    elle dit qu'il y a un tueur sur la route

    qui cache son visage aux vieux qui soufflent,

    aux enfants shooters de ballons, aux poignets de portes.

     

    Les corps se badigeonnent nus

    en gels miracles

    comme ils empilent l'une sur l'autre des bouées de sauvetage

    qui se dégonflent vite.

     

    Ponce Pilate n'est plus le seul à se laver les mains,

    et plutôt trois fois qu'une.

     

    Et les vagues  continuent  

    mais sans nous

    à lécher nos plages.

    L'été, ce sera pour demain. Ici, on le raconte en rêve.

     

    Étranges, nos soucis

    de passagers de la tourmente

    qui tirent sur imprimante le laisser-passer

    de sortie.

    Rentrez chez vous, répète le mégaphone.

     

     

    Sur les branches de l'acacia,

    les deux moineaux n'y entendent rien,

    ni les mésanges, ni les goélands voleurs,

    ni les guêpes qui font leur premier nettoyage de printemps.

     

    Le buis est d'une forme insolente dans son exposition

    de plein air.

     

    On voit des chiens qui tirent leurs maîtres de compagnie.

     

    Et les questions errent dans les rues.

    La rumeur qui rôde remontera-t-elle la pente?

    Comment respirent-ils, les poumons envahis ?

    Que deviennent les morts sans sépulture ?

    Comment dans l'appartement

    régler la journée des enfants et les chamailleries ?

    Ici une maman apprend à se faire appeler "maîtresse"

    par son fils. Elle en sourit et se demande combien

    de temps durera le rôle.

     

    On dit qu'à Wuhan, ce fut un temps de pain bénit

    autant pour les divorces et que les naissances.

     

    Alors les zélés travaillent, il y en a toujours eu,

    ceux qui se jettent à corps perdus sur les instants,

    plus que jamais les zélés dévorent leurs écrans

    qu'ils trouent de plus en plus

    pour inventer des tunnels, des sas, des passerelles.

     

    Tandis qu'aux fenêtres à huit heures,

    à côté des linges qui pendent,  les casseroles

    inventent un orchestre de bruits

    en hommage aux gens masqués et aux soldates en blanc.

     

    Et toi, passager de la tourmente, soudain

    immobilisé, tu entends

    des hurlements dans tes oreilles:

    qui viendra prendre le dessus ?

     

    Fini l'ouest,

    fini l'autobus bleu.

     

    Finis cinoche et troquet,

    les embrassades de peau à peau.

     

    On s'encapsule.

    On se parcourt de baume.

    On se met camisole de distance

    et on découvre à tous petits feux

    les lettres du mot: cellule d'isolement.

     

    Passager de la tourmente. Et alors ?

    Tu es chanceux.

    Infiniment.

    Pour le moment.

     

    Apprends juste les couloirs,

    le bout de table,

    la pomme à croquer,

    la poussière dans l'œil du tiroir.

     

    Et ce n'est pas la fin d'en rire!

     

    Apprends

    l'incroyable silence

    qui avait déserté la place.

    Et pourquoi faudrait-il en avoir peur ?

     

    Après tout, dans cet habitacle de fortune,

    jeté avec les autres,

    c'est l'heure de reconnaître

    des tas de choses qui n'avaient pas de noms.

     

    Tous les enfants

    ne deviendront pas fous

    dans l'attente des pluies espérées.

     

    Allez, chanceux, tu ne pourras pas disparaître

    d'une dose de trop

    dans les toilettes sordide d'un bar.

     

    Fais quand même gaffe à ta baignoire trop pleine

    ou au court-jus.  Aux engueulades qui cognent trop,

    aux vengeances des monstres de l'intérieur.

     

    Pose doucement ta tête absente

    sur mon drap blanc teinté de rouge.

    Lançons-nous des signaux,

    à la façon des autochtones.

     

    Les choses ne sont pas ce qu'on pourrait croire,

    mon docteurs demain aura retrouvé son visage.

     

    Agrippons-nous au mot "confiance"

    qui s'amuse de tout et voit pousser

    sur la butte blanche de calcaire

    les premiers pissenlits.

     

    On se donne rendez-vous,

    mes passagers de la tourmente.

    Une coupe de champagne à la main.

     

    On va traverser la dalle et les cristaux liquides.

     

    Slainthe ! comme on dit en Irlande.

    Santé! Prosit! Prost ! Cheers! Plus que jamais.

     

    Et jusqu'à ce que Vie s'en suive.

     

     

                                      Dominique SORRENTE

     

                                                20 mars 2020

  • J-2: LE BATEAU IVRE DU SCRIPTORIUM EN PHOTOMONTAGE...

     

    PHOTOMONTAGE  MORCEAUX DE BRAVOURE.jpg

     

    Oui, "mettons ensemble nos Morceaux de Bravoure!" C'est le voeu le plus cher que je puisse formuler pour le Scriptorium et ceux qui l'accompagnent. 

    Voilà donc le photomontage des Scripteurs réalisé par Paola Leone pour notre rencontre désormais "à distance" de ce dimanche 22 mars. Merci à Paola!

    Lorsque le temps des retrouvailles viendra, ...un jour..., nous nous retrouverons au Bateau Ivre. Et nous rirons de savoir que l'image a précédé le réel...En espérant que les absents d'aujourd'hui nous rejoindront. 

    IMG_2365 FLEURS JAUNES.JPG

    Gérard Boudes nous propose un portrait décalé, au fil de la semaine.

     

    Portrait à la semaine

     

    Se tirer un portrait ?

    Un lundi on m’a dit : va à la machine

    Et fais lui la gueule.

     

    Il faut du je, il faut du me

    Pour parler de soi

    Du jeudi, du mercredi.

     

    J’étais donc assis sur ce tabouret gris bleu

    Et j’avais devant moi

    Moi.

     

    Rien n’est plus compliqué que sa propre face.

    Qui suis-je ? Je suis

    Attends ! Regarde !

    Je prends ! Tu vois !

     

    Et la photo de la gueule a jailli

    De la fente de la machine.

     

    **

     

    Un rectangle en plastique avec sa gueule

    Cela prouve que l’on est.

    Je suis donc document avec un sang écrit

    Et un code barre pour résumer mon corps.

    Quand je passe un portique un lundi

    On me donne une tête.

    Quand je roule au métro le mardi

    On me rend mes deux pieds.

    Quand ma gueule apparaît au guichet mercredi

    On consent après tout à livrer mes deux bras.

    Et jeudi c’est pour moi je le dis, c’est ici

    Transmettez tout mon jeu et mes jambes sur les prés.

    Quand arrive vendredi, mon auto sur la route

    Je ne peux pas manger car c’est jour de poisson

    C’est heureux que soit là samedi où enfin

    Je retrouve mes viscères et je peux respirer.

    Et dimanche on me rend ce qui reste, les réflexes

    Le sourire et le rire et peut-être le sexe.

     

    Gérard Boudes

    20 mars 2020