UA-156555446-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Antonin Artaud par Marc ROSS

Caravane poétique du Scriptorium – Printemps 2022 – Marc Ross
ARTAUD… ACTE 1 – COURS D’ESTIENNE D’ORVES, 14 HEURES 25

« Quand j’écris un poème, je grince des dents » disait-il !

Né à Marseille un 4 septembre 1896, d’un père armateur prénommé Antoine-Roi et
d’une mère d’origine grecque Euphrasie Nalpas. Une famille de 8 enfants dont 3
seulement ont survécu. Antonin Artaud vécut dans le quartier des chartreux jusqu’à
l’âge de vingt ans. Notamment au 15 rue du jardin des plantes, aujourd’hui : Rue des
frères Carasso.
”Je savais que j’avais toujours souffert de l’être et d’être parce que je n’ai jamais
voulu être un résigné comme les autres…. Je me souviens à l’âge de 6 ans dans une
maison du Boulevard de la Blancarde à Marseille (n° 59 exactement) m’être demandé
à l’heure du goûter, pain chocolat qu’une certaine femme dénommée Mère me
donnait, m’être demandé ce que c’était, que d´être et vivre.” (Artaud, Lettres de
Rodez)
Réchappant à 5 ans à une menace de méningite, il a bégayé entre 6 et 8 ans. Dès l’âge
de 4 ans et demi et jusqu’à ses 18 ans, il fréquente le pensionnat du Sacré cœur situé
au 22 rue des Frères Barthélémy. Il descend chaque jour, le boulevard de la madeleine
(aujourd’hui Boulevard de la libération) pour rejoindre l’établissement scolaire situé
derrière l’église des réformés.
En 1905, il est traumatisé par la mort, à sept mois, de sa petite sœur. Inspiré dès l’âge
de 14 ans, par Baudelaire, Rimbaud et Edgar Poe, il fonde, avec des camarades du
Collège, une petite revue où il publie ses premiers poèmes sous la signature de Louis
des Attides. Il n’a jamais joué au théâtre à Marseille, mais il a publié dans deux revues
de poésie. Notamment dans la « La criée », une revue tenue par un pharmacien qui
s’appelait Léon Franc et qui lui fournissait, sans doute, du Laudanum. La seconde
s’appelait ‘La rose des vents.’
Et c’est justement en 1913, à 17 ans qu’il entreprend de revisiter le bateau ivre de son
mentor. « Un navire mystique » Un voyage étrange et religieusement agité, empreint
déjà de son théâtre de la cruauté. En 1915, un an après la fin de ses études, il effectue
un premier séjour de santé à La Rouguière. S’en suivront plusieurs séjours en d’autres
lieux. (Rodez… Ivry)
Dans les cahiers de Rodez, il raconte, qu’un jour de 1915, il a été frappé d’un coup de
couteau dans le dos par deux souteneurs, Cours de Villiers, juste devant l’église des
réformés : « Je n’ai pas eu le temps de me retourner que je sentis une lame me
déchirer l’arrière du cœur dans le dos, dans le haut de l’omoplate, à 2 centimètres de
la colonne vertébrale. »
Il pouvait lui arriver de dire qu’il détestait Marseille, sa ville natale. Lorsqu’il
parle du grand St Antoine, on peut lire :
« La peste n’est pas arrivée par le bateau. La peste a toujours été à Marseille. »
À l’automne 1921, il entre dans la troupe de Charles Dullin et rencontre Génica
Athanassiou, une jeune comédienne roumaine qui deviendra le grand amour de sa vie.
En 1917, il envoie quatre poèmes à André Suarès.

Et puis, il y a bien sûr, la revue de Jean Ballard et qui grâce à André Gaillard, va
accueillir des auteurs surréalistes. Il publie : Michaux, Crevel, Benjamin Perret.
S’en suit, une amitié très forte entre Artaud et Gaillard. En février 1927, « Les cahiers
du Sud » N°87 publient : « Manifeste pour un théâtre avorté ». En mars de la même
année, Artaud lui confie un texte qui lui est dédié et qui suit « Le pèse-nerfs » :
« Fragments d’un journal d’enfer » (Les cahiers du Sud – Marseille – Collection
critique N°5).
Dédicace d’Artaud à André Gaillard (1 ère page de L’ombilic des limbes)
« À mon cher André Gaillard, un des rares qui aient mis leur doigt d’homme sur ma
peine de mort. » A.A
Un poème d’Antonin Artaud, c’est avant tout un choc, un coup porté aux points du
corps qui sont les plus proches à subir une révolution mentale. En cela, il s’agit à la
manière du tam-tam ou de l’incantation magique. Ce qui frappe dans ses poèmes, c’est
la réinvention totale de la forme, la trouvaille verbale, une sorte de miracle phonétique
sans cesse renouvelé. Ici, la phrase non seulement grince inhumainement, se brise, se
déconstruit, mais elle s’agence sur un plan supérieur dont le moins qu’on puisse dire
est qu’il permet des résonances que, jusqu’ici, la poésie n’avait jamais connues.
--------------------------------------------------------------------------------------------------------
TEXTE D’ANTONIN ARTAUD LU SUR LE COURS D’ESTIENNE D’ORVES :
(Extrait de : 50 dessins pour assassiner la magie) Texte publié seulement en 2004
Quand j’écris,
J’écris en général
Une note d’un
Trait
Mais cela ne
Me suffit pas,
Et je cherche à prolonger
L’action de ce que
J’ai écrit dans
L’atmosphère, alors
Je me lève
Je cherche
Des consonances,
Des adéquations
De sons,
Des balancements du corps
Et des membres
Qui fassent acte,
Qui appellent
Les espaces ambiants
A me soulever
Et à parler
Puis je me rapproche
De la page
Ecrite

Et
...
Mais j’oubliais de
Dire que ces
Consonances
Ont un sens,
Je souffle, je chante,
Je module
Mais pas au hasard
Non
J’ai toujours
Comme un objet prodigieux
Ou un monde
A créer et à appeler.
Or je connais
La valeur plastique
Objective du souffle,
Le souffle c’est quelque
Chose dans l’air
Ce n’est pas de l’air
Remué
Seulement,
C’est une concrétisation
Massive dans
L’air
Et qui doit
Être sentie
Dans le corps
Comme une agglomération
En somme atomique
D’éléments
Et de membres
Qui à ce moment-là
Font tableau.
Une matière
Très au-delà
De celle du sucre
D’orge
Naît à ce moment

Instantanément
Dans le corps,
Matière électri-
Que

Qui pourrait
Expliquer Si elle était
Elle-même
Explicable
La nature
De certains gaz
Atomiques
De certains
Atomes répulsifs
Je dis atomes
Comme je dirai
Pan de mur,
Paroi volcanique,
Artère en fusion d’un
Volcan,
Muraille de lave
En marche vers un
Renversement de
L’immédiat devenir,
Mes dessins donc reproduisent
Ces formes
Ainsi apparues,
Ces mondes de
Prodiges,
Ces objets
Où la voie
Est faite
Et ce qu’on
Appelait la grande œuvre
Alchimique désormais
Pulvérisé car nous ne
Sommes plus dans
La chimie
Mais dans la
Nature
Et je crois bien
Que la Nature
Va parler…

*

(Extrait du poème présenté dans ce schéma dans son cahier
et qui accompagnait ses derniers dessins, certains malmenés)

Écrire un commentaire

NB : Les commentaires de ce blog sont modérés.

Optionnel