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AMICALES RETROUVAILLES AU COIN DU FEU : VEILLÉE POÉTIQUE & ÉMERVEILLEMENT

Mais alors, dit Alice,
si le monde n’a absolument aucun sens,
qui nous empêche d’en inventer un ?
Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles 

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Persian series (1999-2000) © Stan Brakhage

 

Pour Jean-Marc Audouin, et tous nos aimés fantômes

 

Samedi 10 décembre 2022 les poètes et poétesses du Scriptorium se retrouvaient pour la traditionnelle veillée poétique au coin du feu. Cette année, la thématique enchanteresse de l'ÉMERVEILLEMENT avait été lancée pour mieux nous réchauffer en compagnie des flammes, vaillamment entretenues par l'hospitalité bienveillante et pétillante d'Isabelle Alentour.

Des retrouvailles joyeuses et nombreuses aux alentours de Marseille pour terminer l'année des Scribes en beauté, il va sans dire.

Marie-Philippe Joncheray nous avait concocté un vin chaud de saison des plus goûteux pour ouvrir la soirée et ses festivités.

Après une brève présentation par Dominique Sorrente de l'état des troupes (en substantielle augmentation) et des événements futurs du Scriptorium (de belles perspectives en vue...), la soirée fut ouverte par Emmanuelle Sarrouy qui fit circuler des étoiles filantes, petit livret cartonné de la poétesse Mélanie Leblanc, où chacun devait piocher et lire au hasard un Je te souhaite…

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La soirée s'est poursuivie par de nombreuses lectures croisées, entrecoupées de délicieux mets apportés par les uns, les unes et les autres.
 
Une soupe miso, préparée par Henri Perrier Gustin est également venue ponctuer la soirée invitant nos papilles au voyage en terres d'Asie…

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S'imposait alors un retour en mots et en images… Nos bleus les plus intenses, déployés au plus profond de nos cœurs. Petit florilège...

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L’émerveillement   
    
    Emerveillée par la joie d’écrire
    Je parle à moi-même
    À des gens absents
    Ou ne dis rien 
    Je laisse libre cours aux pensées
    Des images émergent des rythmes s’entendent
    Je me plie au charme des mots
    En aiguisant ma voix j’avive mon état d’âme
     Voilà le chant des paroles   
    Et son effet résonnant 
    qui se transfigure et s’éclaircit 
    en magie du poème   
    
    A mon désir de la grandeur et richesse
    D’une nuit semée d’étoiles
    Suit l’arrivée d’une onde fraiche
    Et le rejet de l’univers
    Au sommeil d’enfant
    Dans ma main je tourne le jour
    Pour arpenter mes pas sur le sol
    Je laboure et je danse
    En respirant avec le temps       

    Les livres sont mes contemporains
    Me protègent consolent réconfortent
    La grâce des paroles 
    Comme bonheur des jours à venir
    L’essai du temps maîtrisé
    Je trace le visage de mes bien-aimés
    Le manque du souffle de bouche à bouche
    L’éclair des yeux sur la peau des joues
    Sur les tempes le sourire des rides 
    L’élan des lèvres affamées
    Tête à tête l’une à côté de l‘autre 
    L’une sur l’autre
    Un parfum qui stimule le sang

    Leonor Gnos
 
***      ***      ***

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***      ***      ***

 
Je pense aux personnes merveilleuses de ma vie je pense 
À vous mes amis vous mes inconnus innombrables je 
Pense à Robert Desnos dont les yeux étaient 
Des perles je pense à Rimbaud le jeune homme vert qui 
Rougissait jusqu'aux oreilles je pense à d'Aubigné 
Couché avec ses pistolets

Je pense aux personnes à merveille dans ma vie mes 
Frères loin mes potes en allés mes jamais rencontrés 
Je pense au cœur de ma mère solitaire je pense 
Sur la tête de mon père je pense à mes aïeux en rangs 
D’oignons dessous la terre je pense à ma grand-mère 
Sempiternelle qui avait le blues toujours dans sa vieille blouse
Je pense aux personnes merveilleuse à vie je pense à 
Leurs coups de mains je pense à leurs coups de pieds 
Au soleil cou coupé et à baise m'encore je pense à 
Leurs coups de reins je pense à leurs coups de dés

Je pense aux personnes qui me merveillent la vie d'hier 
À aujourd'hui et jusqu'au lendemain la merveille de 
Leurs voix de leurs rires et chagrins je pense à eux 
Longtemps je pense à eux très vite je pense à elles 
Aussi je pense partout à lui

Je pense aux personnes dans ma vie merveilleusement 
Je pense merveilleusement aux personnes de ma vie 
Car je n'oublie personne personne et pas même moi 
Je pense à tout le monde et m'y trouve comprise je 
Pense à moi qui pense à vous et à merveille
Valérie Rouzeau , Va, le temps qu’il fait
 
 
***      ***      ***
 

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***      ***      ***

dans un roman shakespearien 
advient Lou Reed
avec Just a perfect day
la pensée décolle
un passé heureux rapplique 
et peu importent alors
le brouillard
la pollution
le FN

nous écoutons Just a Perfect day
c’est écrit
dans le roman 
dans la chanson
ils boivent
la sangria dans un parc

je me souviens 
du verre de champagne
bon marché
guinguette des Buttes Chaumont
et puis (pas dans le roman
toujours chez Lou Reed)
a good movie

le bonheur
advient
par bribes

Catherine Weinzapepflen, Quinze in Le rrawrr des corbeaux

 

***      ***      ***

 

En ce temps-là j’étais en mon adolescence
J’avais à peine seize ans et je ne me souvenais
déjà plus de mon enfance
J’étais à 16.000 lieues du lieu de ma naissance
J’étais à Moscou, dans la ville des mille et trois
clochers et des sept gares 
Et je n’avais pas assez des sept gares et
des mille et trois tours
Car mon adolescence était si ardente et si folle
Que mon cœur, tour à tour, brûlait comme le
temple d’Éphèse ou comme la Place Rouge
de Moscou
Quand le soleil se couche.

Et mes yeux éclairaient des voies anciennes.
Et j’étais déjà si mauvais poète
Que je ne savais pas aller jusqu’au bout.

Le Kremlin était comme un immense gâteau
tartare croustillé d’or,
Avec les grandes amandes des cathédrales toutes blanches
Et l’or  mielleux des cloches…

Blaise Cendrars, Prose du Transsibérien

 

***      ***      ***

Je n'avais pas envisagé de monter dans l'arbre ce matin il faisait froid et le vent détrempé par la pluie de la veille soufflaient encore avec des gouttelettes.
Et pourtant dans l'Aube grise et sans relief j'ai escaladé  le platane.

Fanes de radis
L'ascension vertigineuse
Du limaçon

On imagine toujours que le merveilleux s'accompagne de nuits étoilées, de pleine lune ou bien de soleil éblouissant, de forêt foisonnante, de lapin blanc et d'étincelles dorées dans un ciel calme.
Et bien ce matin là il faisait froid ,gris, sombre et même après le lever du soleil, la lumière restait hermétiquement close comme si le jour ne devait jamais se lever, et pourtant je suis allée à la rencontre du merveilleux.

Pour atteindre les branches les plus basses pataugeant dans l'herbe détrempée j'ai escaladé le dossier du banc et atteint directement les charpentières.
J'avais les mains gelées par le froid de décembre, et malgré mon bonnet et mon anorak je ne me sentais pas confortable, le ventre froid,.
J'ai continué à grimper un peu plus haut peut-être à 5 m au-dessus du sol et je me suis calée là sur une gros noeud  d'élagage.
L'arbre frissonnait et les feuilles mortes encore accrochées aux brindilles, faisaient un petit bruit de cliquetis, les couleurs sans relief, oscillaient entre le brun et le gris,
J'étais hypnotisée par ce clignotement des feuilles dans l'arbre.

Le vent qui soufflait bercé des branches et moi-même d'avant en arrière, une mère géante bercant dans ses bras son enfant

À la cime une pie posée sur la dernière branche jacassait son cri de pie.

Brusquement le vent s'est mis à souffler plus fort en tournoyant dans le platane, les frondaisons fragiles de l'hiver craquaient et lentement montant du sol, une rafale en spirale s'est formée décrochant petit à petit toutes les feuilles mortes
J'etais le centre d' une grande nébuleuse, autour de moi des milliers de paillettes  brunes aspirées me poussaient vers les houppes,je ne sentais plus le froid,
Bien au contraire une douce chaleur m'enveloppaient , des petites mésanges charbonnières, accrochées à mes vêtements, piaillaient, sifflaient, leur chant familier emportees dans une tornade bienveillante et nourricière.

Nous continuons, à tournoyer ensemble, humain oiseau et feuille emmêlés, et de manière ascendante , grimper , grimper vers les brumes du ciel.

Puis doucement les feuilles, les oiseaux et moi-même sommes retombées sur le sol. Dans un doux bruit feutré mes pieds crissant dans un épais tapis de feuilles mortes, j'ai levé la tête et découvert l'arbre tout nu qui me souriait.

Jour d'automne
par-dessus les toits des humains
la vérité du vent

Claudine Baissière

 

***      ***      ***

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***      ***      ***
 
Ma vie allait mal. Très mal.
Je suis sorti me promener. 
J’ai rencontré un homme. Il allait et chantait.
Il allait en chantant.
Alors j’ai dit : ‘ Homme, tu chantes, n’est-ce pas ? Faut-il que ta vie soit si bonne ? Je t’envie.’
‘Non, a répondu l’homme. Ma vie va mal. Très mal. Mais quand je commence à chanter, ma vie va toujours mieux. Voilà pourquoi je chante.’
Jonas Mekas, Lettres de Nulle Part
 

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***      ***      ***
 
 
Je te souhaite des éblouissements.
Je te souhaite le feu qui fait renaître.
Je te souhaite la compagnie des fées.
 
Mélanie Leblanc, des étoiles filantes
 
***      ***      ***
 

                 Ainsi passa ce soir la peuplade des émerveillés... 

 Les « émerveillés » possèdent un cortex singulaire plus petit car moins enflé de stress synthétique.

 Ils sont spécialisés dans les moments fugaces à saisir comme on attrape au vol les canards sauvages ou les bonnes blagues.

Ils ont barbouillé d'enfance leur vie entière, même quand leurs genoux sont écorchés vifs.

 Ils gardent le goût des cailloux portés à la bouche, s'éclaboussent dans les flaques et font peur aux passants besogneux avec leurs lampes magiques.

 Les émerveillés répètent qu'aucun jour n'est semblable à l'autre. On n'est pas obligé de les croire mais on aurait tort.

Ils prétendent aussi, dur comme fer, qu'Ariane ne s'emberlificotera pas plus qu'une saison avec son fil dans le labyrinthe.

Les meilleurs ennemis des émerveillés n'arrivent pas à prononcer le mot: Wahou !

Ils pratiquent la numérisation de l'enfance.

Ils se reconnaissent immanquablement avec leurs yeux de colin froid.

Dans certaines contrées du Sud, les émerveillés ont trouvé un petit nom savant pour se nommer entre eux.

Il leur suffit de lever les deux bras en même temps et de recevoir un paysage ou une pensée à leur couper le souffle.

Tomber en émerveillement est leur activité journalière, même par gros temps.

 On les appelle à l'approche de Noël les RAVIS.

                                               Dominique Sorrente

 

                                                               *

 

Nous vous donnons d'ores et déjà rendez-vous le dimanche 29 janvier 2023 à 16h30 à l'AKDmia del Tango (13001 Marseille) pour une rencontre Poésies en scène : Le Cabaret des Mots & Notes partagés.

 

 

 

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