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  • RETOUR SUR LA VEILLÉE "FEU, LE POÈME" du 16 janvier 2016

     

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                                                                                           photos Audrey Gambassi 

     

    Les moments heureux se méritent, m'a-t-on dit.

    D'abord, il a fallu trouver le lieu de notre réunion poétique.

    Le GPS n'est pas poète : il ne connaît pas la métaphore, ni même la simple approximation. Il ne voit aucun rapport  entre « rue » et « chemin ».

    C'est ainsi que je me suis  retrouvé au fond d'une impasse, puis dans un champ.

    Contre toute attente, j'étais en fait sur le bon chemin et dans la nuit noire, la voix de notre hôtesse nous a guidés jusqu'à la maison.

    Et nous voilà soudain accueillis devant un feu de cheminée, une belle table, un vin chaud à la main, par des visages connus et inconnus, tous bienveillants.

    La magie du feu poétique avait opéré.

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    C'est là que tout a vraiment commencé.

    On a entendu des bouts de l'histoire du Scriptorium, l'histoire de la passion intacte malgré les années. L'histoire d'artistes qui animent le souffle poétique et le répandent autour d'eux. L'histoire d'hommes et de femmes qui sont dans la vie, les responsabilités, et qui donnent aux jeunes et à tous la poésie à entendre, à voir, à toucher.

     

    C'est ainsi que les projets en cours sont évoqués, que  l'   « accordez on » se déploie sous nos yeux, qu'Ashraf Fayad, poète emprisonné et condamné à mort, s'invite parmi nous car il est des nôtres et nous sommes engagés avec lui. Le Scriptorium, avec l'aide d'autres partenaires, lui organise une soirée au Toursky.....

    Le feu poétique agit.

     

    Enfin, le feu d'artifice est lancé. 

    Chacun y va de sa flamme :  textes, poèmes, chanson, guitare, tous les ingrédients d'un grand feu de joie. Nous avons dansé un poème autour de ce feu.

    J'ai appris ce soir  qu'on pouvait danser un poème.

     

    PATRICK GODARD

     

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  • ASHRAF FAYAD, POÈMES EN RÉSONANCES VIVIANE CIAMPI

     

    Ces deux poèmes nous ont été confiés par la poète italienne Viviane Ciampi lors de la rencontre de solidarité avec A.Fayad, le 21 janvier 2016, à Marseille, rencontre pour laquelle elle avait fait tout spécialement le déplacement de Gênes avec le photographe Lino Cannizzaro.      

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                                                                              photo: Lino Cannizzaro

     

    TOUT SE TAIT

                                  

                                       Où te promènes-tu sans passé ni mémoire 

    te caches-tu sous mes pieds toi qu’on nomme le-si-bien-caché

    ou dans l’avion du ciel cou tendu, très tendu vers le bas

    serres-tu les poings viendras-tu me chercher

    à la Gare de la Débâcle  

    je n’ai pas rencontré les lanceurs de couteaux

    ni bu le sang versé dans la plaine ni collé l’oreille au parloir des prisons

    mais ce matin quand j’allais au lavoir l’eau n’était plus limpide

    elle reflétait les traces de la barbarie les fils de l’ogre maléfique

    ce qui demeure enfoui sous la muraille du monde.

    Une clef gisait au fond mais qui aurait pu la prendre, qui. 

    Le sais-tu j’ai failli me quitter – non non – disais-tu.

    Le cercle des mouches m’attendait déjà j’ai crié ton nom si fort mais si fort

    que toutes les vaches se sont retournées avec leurs bons yeux de vaches.

    Que pouvaient-elles comprendre. Là, au fond de l’eau j’ai aperçu

    les poètes dont l’ombre est la semence qui navigue de mot en mot, de mot en silence

    ceux qui pendus – corde encore brûlante – nous apostrophent

    de toute leur force debout. Écoute. Le temps éclate dans les veines.

    Litanie d’enfance interrompue. Alors, quelle vision. Si jamais la démence… la démence…

                         C’est à eux désormais que je m’adresse.

     

     

     

    TUTTO TACE

     

                                     Dove stai aggirandoti privo di passato memoria

    ti nascondi sotto i miei piedi te che chiamano il-così-ben-nascosto

    o dentro l’aereo del cielo collo teso molto teso verso il basso

    stringi i pugni verrai a cercarmi alla Stazione del Tracollo

    non ho incontrato i lanciatori di coltello

    né ho bevuto il sangue versato nella pianura né ho incollato l’orecchio al parlatorio

    ma stamattina andando al lavatoio l’acqua non era più limpida

    rifletteva le tracce della barbarie i figli dell’orco malefico

    ciò che rimane sepolto sotto le mura del mondo.

    Una chiave giaceva sul fondo ma chi avrebbe potuto prenderla, chi.

    Tu lo sai quasi mi stavo lasciando – no no – dicevi.

    il cerchio delle mosche già mi attendeva, forte ho gridato il tuo nome, ma così forte

    che tutte le vacche si sono voltate coi loro begli occhi di vacche.

    Che cosa potevano capire. Lì, in fondo all’acqua

    ho intravisto i poeti la cui ombra è semenza che naviga di parola in parola, di parola in silenzio

    coloro che impiccati – corda ancora rovente – ci interpellano con tutta la loro forza in piedi.

    Ascolta. Il tempo scoppia nelle vene.

    Litania d’infanzia interrotta. Allora, quale visione. E se la follia… Se la follia…

                                                         È a loro che mi rivolgo d’ora in poi.

     

      

                                                               Viviane Ciampi

                            (TRADUIT DE L’ITALIEN PAR L’AUTEURE)

     

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    VALORI

     

    Considero valore ogni forma di vita, la neve, la fragola, la mosca.
    Considero valore il regno minerale, l'assemblea delle stelle.
    Considero valore il vino finché dura il pasto, un sorriso involontario,
    la stanchezza di chi non si è risparmiato, due vecchi che si amano.
    Considero valore quello che domani non varrà più niente e quello 
    che oggi vale ancora poco.
    Considero valore tutte le ferite.
    Considero valore risparmiare acqua, riparare un paio di scarpe,
    tacere in tempo, accorrere a un grido, chiedere permesso prima di sedersi,
    provare gratitudine senza ricordare di che.
    Considero valore sapere in una stanza dov'è il nord,
    qual è il nome del vento che sta asciugando il bucato.
    Considero valore il viaggio del vagabondo, la clausura della monaca,
    la pazienza del condannato, qualunque colpa sia.
    Considero valore l'uso del verbo amare e l'ipotesi che esista un creatore.
    Molti di questi valori non ho conosciuto.

     

    Valeur

     

    J’attache de la valeur à toute forme de vie, à la neige, la fraise, la mouche.

    J’attache de la valeur au règne animal et à la république des étoiles.

    J’attache de la valeur au vin tant que dure le repas, au sourire involontaire, à la fatigue de celui qui ne s’est pas épargné,  à deux vieux qui s’aiment.

    J’attache de la valeur à ce qui demain ne vaudra plus rien et à ce qui aujourd’hui vaut encore peu de chose.

    J’attache de la valeur à toutes les blessures.

    J’attache de la valeur à économiser l’eau, à réparer une paire de souliers,

    à se taire à temps, à accourir à un cri, à demander la permission avant de s’asseoir, à éprouver de la gratitude sans se souvenir de quoi.

    J’attache de la valeur à savoir où se trouve le nord dans une pièce, quel est le nom du vent en train de sécher la lessive.

    J’attache de la valeur à l’usage du verbe aimer et à l’hypothèse qu’il existe un créateur.

    Bien de ces valeurs, je ne les ai pas connues.

     

    Erri de Luca, poème extrait de Œuvre sur l’eau. Traduit de l’italien par Danièle Valin, éditions Seghers, 2002.

     

    Cité dans Tout doit disparaître (chapitre 8), Mikaël Ollivier. Ed. Thierry Magnier, 2007.