Un matin effilé comme un songe elle s'avance
D’un pas lent
Vient de loin
Me couvre du regard
- deux lacs d’ambre limpide, soudain le calme
Me dit qu'il est cruel
D’épuiser la parole
En futiles verbiages
Assieds-toi tout au bord, me dit-elle
Assieds-toi en retrait
Et écoute en silence ce que te dit le monde
Attends que les mots viennent
Attends qu’ils viennent à toi
Accueillir les mots nus, blessés, ou démunis
Voilà tout ce que tu peux exiger de toi
Et c’est déjà la moitié du chemin qui est fait
Le chemin que l’on ne -
Le chemin qui ne se -
Premier poème écrit à coups de plumes d’anges
*
- Souvenir -
Je pense souvent à elle.
Et je ne peux penser à elle sans que résonne à mes oreilles les bruits de la forêt, ceux qu’elle m’apprenait à écouter au cours de nos balades printanières dans le sous-bois de la forêt de la Sainte-Baume. Un mélange de silence, de souffles du vent dans les hautes futaies et de pépiement des oiseaux, aussi chatoyant que l’étaient les éclats de lumière qui filtraient au travers des frondaisons.
Notre consigne curieusement, pendant tous ces week-ends passés dans la maison de campagne, c’était : « Aucune musique ! ». « No music ! ». C’était se couper pendant deux jours du déferlement de rock qui roulait dans nos oreilles d’adolescentes le reste de la semaine. Evidemment nous avions nos grands classiques, Les Beatles, Albums Bleu, Rouge et Blanc. Nos chouchous, Stairway to Heaven de Led Zep. Et nos inconditionnels : Genesis… Mais le week-end, c’était : Silence !
Car Frédérique, ma meilleure amie, ma confidente, mon Hirondelle, avait un projet : apprendre le chant des oiseaux. Parvenir à imiter leurs chants, à siffloter, chanter, pépier, gazouiller comme eux. Et elle y réussit. En pas même une année, elle parvînt à reproduire à la perfection une gamme incroyable de chants de différentes espèces.
Son projet avait un deuxième volet, plus improbable sans doute : elle voulait apprendre à voler. Aussi vite, aussi haut, et aussi beau que les hirondelles qui traçaient là-haut dans l’azur. Elle assurait qu’elle y parviendrait.
Simplement, cela prendrait un peu plus de temps.
*
Elle avait enlevé son manteau comme on dépose sa vie
Parvenue au bout de la planche
Mouvement suspendu
Un pied dans le vide
Les yeux fermés
Elle appela
Et tous les autres étaient absents
*
Ce matin n’est pas un matin
C’est un effacement
Une discrétion
Un retrait
Une place faite à l’absence
Un hommage feutré du silence à la nuit
ISABELLE PELLEGRINI
Commentaires
Magnifiques textes, Isabelle.
Grand merci.
À bientôt de vous lire encore, j'espère ; ici ou ailleurs.
François
Bonjour François,
Bien contente de votre passage par ici, qui se renouvellera je l'espère. Un grand merci !
Isabelle