à l'occasion de la sortie de A la digue du large (créé avec le peintre Gilles Bourgeade, édition Tipaza, 2020), Dominique Sorrente trace quelques repères pour la lecture-signature-expo qui se déroulera prochainement à l'atelier Christine Fabre Bourgeois à Marseille. Une mise en condition tonique !
En route pour le déchiffrement...
Dominique Sorrente Gilles Bourgeade
AJL : Côté livres, on vous avait quitté en poésie (avec « Les gens comme ça va » (Cheyne, 2017), qui portait toute son attention à l’humain contemporain, étrange et familier, au sortir des attentats de 2015...Ici, on vous retrouve au contact avec les éléments, et notamment la mer, votre proche horizon à Marseille, comme un prolongement de cet autre livre, "Mandala des jours". D’où écrivez-vous aujourd’hui?
DS : J’écris d’où ça me chante ! "Est-ce ma faute à moi si ce n'est pas le même à chaque fois..."(sourires). Chaque pierre de touche me renvoie à l’autre. Ce n’est jamais le moi raisonneur qui commande les poèmes. Ici, je ne délaisse pas la pâte humaine, loin de là. Mais je réapprends à respirer pleins poumons et j’aimerais donner à respirer face à la mer.
AJL : C’est un livre à double entrée. Un poète, Dominique Sorrente et un peintre, Gilles Bourgeade. Comment se passe la co-existence entre les auteurs ?
DS: Complicité, connivence, compagnonnage...espérons que nous n’en restons pas à la première syllabe…! Gilles Bourgeade est un peintre d’une rare agilité, à l’écoute des poètes depuis longtemps. Lorsque je lui ai avoué ma passion pour le ping-pong, aussi bien physique que mentale, il a répondu banco ! Nous avons réalisé un « Carnet à double vue » pendant le confinement de printemps. Ici, avec A la digue du large, la mise en résonance a également opéré. Et Gilles Bourgeade a inventé ses digues en contrepoint des poèmes. Son art est de créer un univers ...parallèle...sans que l’image ne dévore jamais l’aventure des poèmes. Dans ce travail de pastels, il glisse entre Turner et Rothko, si j’ose dire…Et, comme disent les sportifs, il a un gros volume de jeu qui mérite le respect!
AJL : Et l’éditeur, Tipaza ? On voit vite que ses livres sont réalisés avec un sens aigu de la forme…
DS : Oui, Gilbert Casula et Yvy Bremond sont particulièrement attentifs à la disposition graphique, aux alliances des formes. Et jamais en panne de projets innovants. « A la digue du large » est le premier livre d’une nouvelle collection Nota Bene qui accueillera bientôt un deuxième ouvrage, « Ajouter au désordre », de Jacques Brossard et Roland Kraus. Des ouvrages en série limitée ( et avec quelques rares exemplaires de tête) qui, je l’espère, trouveront leurs lecteurs. Il faut saluer les éditeurs, tels que Tipaza, qui réalisent des livres de poésie dans la conjoncture actuelle.
AJL : Comment voyez vous la rencontre avec le public ?
DS : J’aime dire qu’écrire, c’est ouvrir une fête. Et pour qu’elle soit réussie, il est indispensable de partager une rencontre. C’est la raison pour laquelle nous avons donné rendez-vous avec les futurs lecteurs, ce dimanche 11 octobre, à Marseille, au 25 cours d’Estienne d’Orves. C’est un immeuble emblématique de la vie artistique, avec au rez-de-chaussée la librairie salon de thé Les Arcenaulx, et aux étages plusieurs ateliers d’artistes. Notre rencontre est accueillie par la relieuse d’art, Christine Fabre Bourgeois, ce qui est réjouissant et correspond bien à la démarche de tissage entre les arts que pratique aussi notre livre.
AJL: Et quel sera le mode d'emploi de la, ou plutôt des rencontres ?
DS: Rencontre au pluriel, vous avez raison. Trois séquences sont prévues pour garder une jauge adaptée compte tenu de l'épidémie en cours et des précautions sanitaires que nous respectons. Une séquence à 16h, une à 17h30, une à 19h. Le public doit juste réserver par mail ou téléphone. Il y aura la partie signature des exemplaires, puis une présentation du livre par les auteurs. Je donnerai une lecture à voix haute de quelques poèmes, ma guitare traînera dans les parages... Sans oublier de jeter un regard sur l’exposition d’oeuvres de Gilles Bourgeade et un échantillon de mon fonds personnel d’auteur.
AJL : Le poème pour relier, en somme ?
DS : Oui, plus que jamais, en ces temps de recroquevillement, de frilosité, je plaide pour des moments de rencontre, comme nous le faisons au Scriptorium. La pandémie actuelle n’est pas une parenthèse, elle signe une mutation, selon moi, et nous devons donc trouver des solutions, des pratiques adaptées, sans rien céder de notre ferveur. En aucun cas, nous ne sommes appelés à nous dissoudre ! Vivre sous le signe de la poésie, c’est désirer ardemment nous relier, avec les mots dans leurs capacités de vibration. La poésie est d’abord un creuset, un lieu medium dont nous, les poètes, les artistes sommes les vecteurs privilégiés.
Il y a du bonheur à créer ces moments, et encore plus à les vivre à plusieurs. J'espère que le public répondra à cette invitation à "ouvrir la fête"...
AJL : Et j’imagine alors que vous allez lever votre verre ?
DS : (sourire)
Je lève mon verre (invisible)
à la beauté, la clandestine,
la fugitive encore à naître,
à celle qui ne demande pas la permission
d’entrer, de sortir, de passer…
Propos recueillis par Anne J.Lofoten
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Pour participer à la signature-lecture-expo de A la digue du large, trois rendez-vous sont prévus : à 16h, 17h30, 19h.
Réservation obligatoire à poesiescriptorium13@gmail.com ou par téléphone : 0491339331
Adresse : Atelier de reliure Christine Fabre Bourgeois, 25, cours d’Estienne d’Orves, 13001 Marseille