Une proposition conjointe du Scriptorium & Pierre Sèche en Vaucluse-
dans le cadre de la manifestation "Trace de poète"
Samedi 21 avril 2018
La caravane des poètes partait en déambulation sur les chemins pierreux de St Gens dans le Vaucluse… pour un fécond dialogue entre l’eau et la terre, thème choisi de cette rencontre.
« L’eau est douce et ne bouge
Que pour ce qui la touche »
Paul Éluard, Poisson
« Toi aussi tu prendras place parmi les illustres fontaines,
quand j’aurai chanté les yeuses qui couronnent l’antre
d’où jaillit ton onde au doux langage. »
Horace, Ode XIII – À la fontaine de Bandusie
Les « caravaniers de l’éphémère » s’étaient donné rendez-vous à St Gens, entre histoire et présent, entre ombre et lumière, entre eau et sécheresse… s’étaient dans un petit coin du monde abrités, en dehors du temps, faufilés !
Un joli partenariat culturel désormais rituel au cœur de la nature en éveil.
D'un côté, l'association Pierre sèche en Vaucluse qui connaît les paysages comme personne; de l'autre, les preneurs de parole qui trouvent dans leur besace des mots, des textes. Devant eux, une légende éphémère à écrire...
Parcours ouvert par Olivier Bastide, ponctué par ses mots joyeux, fort à propos, et autres interventions poétiques entre arbres majestueux, pierres chaleureuses, anfractuosités secrètes, cueillettes d’asperges et autres brocolis.
Ils étaient partis sur les traces de St Gens, des légendes du loup et de la fontaine miraculeuse… entre eau et sécheresse… Avant de se réunir sur le parvis de la chapelle où les voix s’interpellaient en écho, et de poursuivre en échanges de victuailles et quelques bons mots choisis …
Oui, la pérégrination a bien eu lieu en plein cagnard d'avril. Une vraie CARAVANE poétique, telle que nous l'avions désirée, incalculable d'avance, partageuse, mettant au rencart "l'entre-soi", pariant sur les mots apportés ou reçus par chacun et sur l'invention d'un pas devant l'autre. D'une oasis à la suivante. Avec ce qu'il fallait de torpeur, d'explorations sur la molasse, de bifurcations du temps, de paroles jouant à l'écho sur le parvis, et même de frayeur... avec un impromptu de moutons sauvages fendant le sentier des poètes-randonneurs… jusqu'à en renverser !
Entre bories, demoiselles coiffées, miracles du saint lanceur de pluie et tablée de retour "out of control", une Caravane à entrées multiples, portée par le Scriptorium, au cœur du festival Trace de poète, et avec le bon génie de l'association Pierre sèche en Vaucluse.
Saint-John Perse l'avait annoncé: "Quand la sécheresse sur la terre aura tendu son arc, nous en serons la corde brève et la vibration lointaine..."
Et l'eau ne fut pas en reste pour le dialogue polyphonique.
Car pour mieux affronter le monde (sa rudesse et ses tempêtes), il faut parfois savoir s’en éloigner. Retourner à la source…
Ce fut encore un grand moment
Le lieu ne sera pas perdu
Pas plus que ne le seront les instants
D’une eau jaillie à notre vue… »
Gérard Boudes
Prochains rendez-vous à noter dans vos agendas :
- 26 mai 2018, Médiathèque de Robion : 11h lecture/performance de Dominique Sorrente & 15h déambulation poétique sur le thème « l'entre-temps »
- 23 juin 2018, Parc Borély-Jardin Japonais : sieste poétique
Poème à l’eau claire
Incolore, inodore et sans saveur,
Il s’assoit et devant ce papier tout blanchi
Il ne peut rien écrire et n’a rien dans la tête.
C’est ainsi que le vide cerveau s’affranchit.
Incolore, inodore et sans saveur.
Et comment peut écrire un matin, un poète
Incolore, inodore et sans saveur ?
De n’avoir rien à dire
De n’écrire d’une encre sans couleur,
A jailli de ce vide, ce petit filet d’eau,
Qui serait paraît-il de l’inspiration.
Incolore, inodore et sans saveur.
Gérard Boudes, Saint Gens 21 avril 2018
Anne Lofoten