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DANS L'EUPHORIE DES MOTS RETROUVÉE, MARSEILLE BATEAU IVRE...

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"On ne doit jamais manquer de répéter à tout le monde les belles choses qu'on a lues."
  Sei Shonagon

 

         Rappelons-nous. Il y a un an, c'était la dure annonce du confinement. Dans la sidération de ce moment, les poètes du Scriptorium, réuni.e.s autour de Dominique Sorrente, avaient dû renoncer à vivre leurs "Morceaux de bravoure". Frustration de la privation de parole poétique en public. Personne à l'époque ne pensait que ce temps d'empêchement durerait avec toutes ses péripéties...

 

Mais voilà, mieux qu'une revanche sur le temps empêché, cette fois, quelque chose a eu lieu ce 21 mars plage du Prado Roucas à Marseille. Une vraie promesse tenue de printemps.  Un INSTANT BATEAU IVRE SALUTAIRE sur et autour de ce monument créé pour saluer Rimbaud, à l'occasion du centenaire de sa mort tragique à l'hôpital de la Conception.

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                                                   article du journal La Provence du samedi 20 mars 2021

 

         Pour qui ne le connaît pas, ce Bateau Ivre, en béton de basalte est un massif de pierres rouges qui se laisse escalader par les enfants aussi bien qu'admirer par les passants- quand ceux-là choisissent de de ne pas l'ignorer. Depuis 20 ans, il est devenu le véritable totem des poètes du Scriptorium. Et ce 21 mars, il était investi de bien belle manière.

 

         Convergence des causes : le dernier acte du Printemps des poètes était aussi la  date de la journée mondiale de la poésie (Unesco). Restait à savoir si le public répondrait. Mieux qu'une réponse, une communauté provisoire s'est formée, des gens qui avaient retenu le mot "poésie", le nom "Rimbaud" et qui avaient tout simplement envie de se laisser surprendre autrement qu'en nouvelles déprimantes. Dominique Sorrente, en maître de cérémonie anima la rencontre avec Emmanuelle Sarrouy, alternant les prises de parole vigoureuses ( le poème "J'ai pris ma part") et les invitations à écouter la variété des voix.

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         Un poème "Passagère clandestine" fut dit pour saluer les poètes récemment disparus, Serge Bec, Lawrence Ferlinghetti, Philippe Jaccottet, Joseph Ponthus, Jean-Jacques Viton, ainsi que l'interprète des poètes, Hélène Martin.

 

Puis ce fut le temps d'un bel hommage à Baudelaire ("fringant bicentenaire") qui permit de découvrir ou retrouver les voies classique (Correspondances), ou plus énigmatique (L'étranger), sans oublier les pas de côté (Un poème-épistolaire de Raymond Carver en pélerinage sur la tombe de Charles Baudelaire, lu par Emmanuelle Sarrouy), et aussi les textes de tempérament, véritables coups de sang du poète de Mon coeur mis à nu, l'ouvrage posthume dont certaines formules continuent de faire mouche aujourd'hui.

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Mais sur ce monument, à quelques mètres de "la mer allée avec le soleil", comment oublier Rimbaud ? Le comédien Emmanuel Franval proposa sans appui une interprétation sensible et mouvementée du long poème du Bateau Ivre, histoire de nous rappeler le verbe génial de l'enfant de Charleville. S'en suivit une valse de prises de parole les plus diverses.

 

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Pour certain.e.s c'était le baptême du feu... et zéro sono. Certaines phrases ont dû s'envoler loin des oreilles du public, mais l'important était ailleurs. Une suite de textes personnels (Marjolaine Heeg, Henri Gustin, Charlotte Hamer, Olivier Bastide...), des auteurs du répertoire ( Rutebeuf, Verlaine, Rimbaud encore...), des poèmes venus de pays divers choisis par Wahiba Bayoudia (le Rocher en feuilles de Boukany Dioura, le Naïf et l'Équipe de Malick Fall...), des murmures, des mots chantés, criés... On ressortit même le mot "déclamer", bien loin de la "voix blanche" à la Bresson...Tel est le lot des scènes ouvertes qui ont pour rôle d'accueillir la diversité des expressions à un moment donné. Dans une période si pleine de frustration, on en sent la nécessité.

 

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         Commencée à 15 heures, sans même le quart d'heure de grâce -tant il y avait de l'impatience dans l'air- la rencontre s'est terminée autour des 17 heures 30. Il faut dire qu'était apparu un nouveau participant, le mistral. Discret pendant une bonne partie de l'après-midi, il se fit plus insistant en fin de partie, les derniers résistants se collant à la paroi chaude du Bateau Ivre pour prolonger leurs lectures.

 

           Symbole de cet instant sans frontières : une jeune enfant kurde inconnue est venue se placer, au début de la rencontre, tout à côté de Dominique Sorrente. Elle n'a prononcé aucun mot, mais elle est restée là, longuement, debout, face au public, devant la mer, avec son sourire fier et sa jolie robe de fête. Qui était-elle ? Nous ne le saurons sans doute jamais. Elle était à sa manière l'incarnation de cette "passagère clandestine" évoquée dans un poème d'À la digue du large ( éditions Tipaza).

 " Mes fleurs à partager,

mes carnets de déroutes et de chances reçues,

libre de cœur, j’aime celle ou celui

qui  crie récompense 

pour le temps d’amour qui viendra."

 

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"J’aurais désiré que cette splendeur durât mille années."

Sei Shonagon, Notes de chevet (1002)

 

                                                Anne LOFOTEN

 

              Les photos sont d'Emmanuelle Sarrouy et de Régis Dallaporta

 

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   Prochain rendez-vous public du Scriptorium :

la CARAVANE POÉTIQUE : samedi 24 avril.  Parcours encore secret... à découvrir prochainement !

                       

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Commentaires

  • très beau compte rendu et belles photos .
    Merci pour ce moment de partage si précieux par les temps qui courent ( ou pas ..)

    très émouvant cette jeune fille en costume, comme une elfe millénaire.

    claudine

  • Merci Claudine.

    Ah oui, une "elfe millénaire". C'est tout à fait ça!

    Merci de ta présence. On va faire des choses de plus en plus épiques...

    Dominique

  • Merci Dominique. Quelle magnifique journée ça a du être ! Pour ma part, j’ai réussi à me rendre à Paris juste avant le confinement, heureuse de revoir mes petits enfants après 3 mois. Le retour s’est fait sans problème dimanche .
    En espérant qu’il y aura d’autres belles occasions de se revoir,
    Avec amitié,
    Nathalie.

  • Merci Nathalie,
    tant mieux d'avoir saisi cette chance.

    C'est une période où il vaut mieux ne pas procastiner, me semble-t-il. Oui notre Instant Bateau Ivre fut intense. Et sois sûre que notre cher Daniel Schmitt était avec nous, en poèmes...comme il l'est chaque fois que la vie ardente nous fait signe! Je t'embrasse et à tout bientôt. D.S. (l'autre)

  • Que la poésie dans toutes ses langues et ses tendances et ses cris soit toujours maîtresse des lieux.
    Que la poésie reste pour toujours la belle passerelle pour l’humain le partage l’amour la liberté et la beauté de l’âme.

  • La marche intranquille
    Le son de la marche intranquille, les trompettes en contre-ut et
    Les roulements des tambours et cymbales en tonnerre, l’orchestre et les chants entraînants,
    La musique des troupeaux et le chœur des grandes solitudes.
    Telle est l’œuvre des vents et des brises,
    dans l’odeur imprégnée des sels d’océan.
    Il y a aussi les chocs des roues sur les rails et le barrissement des réacteurs.
    Toute aventure ne commence qu’en bruits et musiques. L’art de bourlinguer se conjugue des ses voix multiples.
    Il semble contraire au silence.
    Il est des vagues légères et caressantes qui appellent à l’amour,
    il en est des prédatrices, des fauves et des monstres qui vous emportent et précipitent
    Et jouent des esquifs, comme fétus de paille dans des torrents,
    Des percussions en solo, qui prennent le voyageur comme graines au sein des maracas.
    Il est de simples rouleaux facétieux dont les coups ne sont que rafraîchissements de visages.
    Sur son quai, un homme attend avec sa valise. La manche droite de son manteau pend comme un drapeau en berne.
    Il lui manque un bras.
    Il semble dormir de bout mais se réveille vite. Il y a trop de bruit et il doit partir
    Le voilà qui monte et s’assoit sur son banc, son bagage pose sur ses genoux.
    Le silence c’est lui, car il est là pour écouter.
    Comprend-il toutes ces langues ?
    Il sait que la sienne seule est petite communication
    Et qu’il ne peut que la garder en réserve.
    De même, arrivé dans un port, il observe un chaland,
    Une coque solitaire et abandonnée, arrivée là par hasard.
    Elle dort échouée dans le sable, comme emportée
    Par l’ivresse de quelques paradis artificiels.
    Les vieux bateaux sont parfois ainsi, réduits à l’état d’épaves
    Et privés de la mémoire de leurs aventures, qui pourtant sont souvent
    Si riches et colorées, capiteuses et remplies de vertus ;
    Et porteurs en leurs cales d’innombrables cargaisons de rêves,
    Opéras, symphonies, et hymnes aux romans et récits infinis.
    S’ils n’entendent les étoiles et sont devenus sourds,
    Abandonnés de leurs lâches capitaines,
    Le regard de leurs bois pourris sous les aubes amères
    Raconte encore des bribes de leurs odyssées.
    Amarrés au quai le plus éloigné des grandes zones de mouvements,
    Ils laissent quelquefois entendre, quelques anciens refrains des époques de découvertes, des tempêtes traversées et des monstres croisés.
    Et si l’homme au bras manquant peut comprendre leurs récits aux chants tronqués,
    C’est qu’il voit certains jours apparaître,
    Surgissant de quelque halo de brumes déposées après la tempête, un autre marin Poète à la jambe sciée,
    Un tout jeune ancien, qui lui avait enseigné les musiques prosodiques
    Et les chants des départs espérés.
    10 mai 2021 Gérard Boudes

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